Alternatives Economiques n° 320 | janvier 2013

 

Un rapport de l'OCDE pointe le retard de l'Hexagone en matière d'intégration des immigrés.

 

La France fait figure de mauvais élève pour l'intégration de ses immigrés, selon un récent rapport de l'OCDE [1]. Avec 11 % de ses habitants nés étrangers à l'étranger, elle se situe dans la moyenne des pays de l'OCDE. En revanche, le taux de chômage des immigrés y est supérieur à la moyenne : 14,5 %, contre 11,9 % en 2010. De même pour le pourcentage de personnes vivant en situation de pauvreté : 21 % des personnes vivant dans un ménage immigré en France sont dans ce cas, contre 17,3 % en moyenne dans l'OCDE. Quant aux enfants d'immigrés, leurs performances scolaires sont un peu inférieures à la moyenne en France. Et leur taux de chômage (15,6 %) est supérieur (13,8 %).

Si l'OCDE ne fournit pas d'explications particulières sur les causes de ces différences entre pays, certaines données peuvent les éclairer. La France est ainsi l'un des pays où la part des immigrés possédant au plus un niveau d'éducation correspondant au premier cycle de l'enseignement secondaire est la plus élevée (45 %). Par ailleurs, la France est, après la Grèce, l'Autriche et les Pays-Bas, le pays dans lequel la part d'immigrés s'estimant discriminés est la plus importante (26 %). "La question du statut juridique des immigrés est fondamentale, estime la spécialiste de l'immigration, Catherine Wihtol de Wenden [2]. Si on maintient des années des gens dans la clandestinité, on ne peut pas s'attendre à une bonne intégration. "

Pas plus de 30 000 régularisations

En la matière, le paysage ne devrait pas fondamentalement changer avec le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, a publié, le 28 novembre dernier, une circulaire précisant les critères de régularisation des étrangers en situation irrégulière. Aux parents, par exemple, il sera demandé de justifier cinq ans de présence en France et la scolarisation de leurs enfants depuis au moins trois ans. Pour les salariés, le temps de présence exigé (de trois à sept ans) dépend de la durée de travail salarié (vingt-quatre mois déclarés pour trois ans de présence, etc.).

Cette circulaire, si elle a le mérite de clarifier la situation et d'assouplir certaines conditions, contient cependant certains critères qui restent flous. Surtout, "une circulaire n'a pas force de loi : son application sera donc laissée à la libre appréciation des préfectures", explique la Cimade. D'autant que Manuel Valls a précisé d'avance le nombre de régularisations : de l'ordre de 30 000 par an, comme lors du précédent quinquennat. "Poser une limite au nombre de régularisations est en flagrante contradiction avec une application juste et équitable de la circulaire, note la Cimade. C'est la loi même qu'il faut refonder." En la matière, le ministre de l'Intérieur se montre prudent. Tout juste a-t-il annoncé qu'il souhaitait créer, en 2013, un titre pluriannuel de séjour dont pourraient bénéficier quelque 50 000 à 60 000 étrangers en situation régulière. Cela permettra de "mettre fin aux difficultés à obtenir le renouvellement d'un titre de séjour [qui constitue] un obstacle à l'intégration."


Franck Seuret