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La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

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Source : Médiapart - Camille Polloni - 12/08/2022

Le ministre de l’intérieur veut priver de titre de séjour les personnes étrangères qui manifestent un « rejet des principes de la République ». Cette mesure, déjà intégrée à la loi « séparatisme » de 2021 mais déclarée inconstitutionnelle, resurgit dans le texte qui doit être examiné d’ici la fin de l’année.

Le projet de loi sur l’immigration porté par Gérald Darmanin devrait occuper le devant de la scène politique pendant plusieurs mois : une « concertation » en septembre, un « grand débat » parlementaire en octobre, puis l’examen du texte, repoussé sur décision d’Élisabeth Borne. 

Début août, Gérald Darmanin a rendu publiques certaines des mesures envisagées pour expulser davantage - notamment les « étrangers délinquants », objet d’une communication effrénée ces dernières semaines –, réduire les délais d’obtention d’un titre de séjour ou encore criminaliser les « passeurs »

Le ministère de l’intérieur a déjà rédigé une première version du projet, vouée à évoluer au gré des débats et après l’avis du Conseil d’État. En l’état actuel du texte, que Mediapart a pu consulter, Gérald Darmanin prévoit la possibilité de refuser ou retirer leur titre de séjour aux étrangers qui manifesteraient un « rejet des principes de la République ».

Gérald Darmanin à Lyon le 22 juillet 2022 © Hans Lucas via AFP / Norbert Grisay.

Ce n’est pas la première fois que l’idée émerge. À l’initiative du sénateur LR Roger Karoutchi, cette mesure avait déjà été introduite dans la loi « confortant les principes de la République » (dite « loi séparatisme ») du 24 août 2021. Mais le Conseil constitutionnel avait finalement censuré cette disposition, qui n’est jamais entrée en vigueur. Les Sages jugeaient l’article 26 trop imprécis : 

« S’il est loisible au législateur de prévoir des mesures de police administrative à cette fin, il n’a pas, en faisant référence aux “principes de la République”, sans autre précision, et en se bornant à exiger que la personne étrangère ait “manifesté un rejet” de ces principes, adopté des dispositions permettant de déterminer avec suffisamment de précision les comportements justifiant le refus de délivrance ou de renouvellement d’un titre de séjour ou le retrait d’un tel titre. » 

Lors des débats parlementaires, la ministre déléguée à la citoyenneté, Marlène Schiappa, avait d’ailleurs exprimé ses « réserves » sur l’amendement défendu par les sénateurs LR et anticipé une censure. « Se pose à notre humble avis la question de la caractérisation du degré de rejet des valeurs de la République. Ça nous semble difficile et nous expose à un risque constitutionnel », affirmait alors la ministre.  

Liberté, égalité, fraternité, laïcité… 

Un an plus tard, Gérald Darmanin remet pourtant le couvert. Dans sa version actuelle, le projet de loi prétend donner « une définition suffisamment claire et précise de ce que recouvrent les termes de rejet des principes de la République » pour satisfaire les exigences du Conseil constitutionnel. 

En réalité, il ne s’attarde toujours pas sur les comportements qui pourraient caractériser un tel « rejet », laissé à l’appréciation du préfet, mais s’attache plutôt à citer les valeurs devant être respectées. Un nouvel article serait ainsi introduit dans le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) : 

« Aucun document de séjour ne peut être délivré à un étranger dont le comportement manifeste qu’il ne respecte pas les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, les symboles de la République au sens de l’article 2 de la Constitution [le drapeau tricolore, La Marseillaise et la devise « Liberté, Égalité, Fraternité » – ndlr] ou le caractère laïc de la République. Tout document de séjour détenu par un étranger dans une telle situation est retiré. » 

Cet article s’appliquerait notamment pour les cartes de séjour temporaire de un an, les cartes de séjour pluriannuelles ou les cartes de résident·e de dix ans, qu’il s’agisse d’une première demande, d’un renouvellement ou d’un titre en cours de validité. Contacté par Mediapart pour des précisions, le cabinet de Gérald Darmanin n’a pas souhaité s’exprimer.  

Du regroupement familial aux « contrats d’intégration » 

Cette mesure s’inscrit dans une évolution du droit des étrangers entamée depuis plusieurs années : celui-ci intègre désormais de nombreuses références aux « principes » et « valeurs » de la République qui n’y figuraient pas auparavant. 

La loi Sarkozy du 24 juillet 2006 prévoit que le regroupement familial peut être refusé si le demandeur ou la demanderesse ne respecte pas « les principes essentiels qui régissent la vie familiale en France » : la monogamie, l’égalité femmes-hommes, le respect de l’intégrité physique des enfants, la liberté du mariage, les différences ethniques et religieuses et l’assiduité scolaire. Ces précisions ont été imposées par le Conseil constitutionnel, alors que le texte initial évoquait les « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République »

Depuis 2011, un étranger ou une étrangère qui souhaite être naturalisé·e français·e doit démontrer son « adhésion aux principes et aux valeurs essentiels de la République ». Jusque-là, ils devaient déjà « justifier de [leur] assimilation à la communauté française », connaître la langue et la culture françaises, ses droits et ses devoirs. 

Depuis 2016, les étrangers et étrangères qui viennent d’arriver légalement en France et souhaitent s’y « maintenir durablement » doivent signer un « contrat d’intégration républicaine ». Celui-ci prévoit la mise en place d’un « parcours personnalisé » qui comprend notamment une formation civique sur les « valeurs et principes de la République ». Ce dispositif succède au Contrat d’accueil et d’intégration expérimenté à partir de 2003, puis généralisé en 2007. Certains titres de séjour y sont soumis, comme la carte de résident ou le visa long séjour pour les salariés. 

Dans un article récent, le professeur de droit public Serge Slama estime que « le contrat d’intégration républicaine pour les étrangers n’a de contractuel que le nom : il ne repose ni sur la négociation ni sur l’échange de volonté, mais uniquement sur des obligations imposées à l’étranger de suivre des formations “prescrites par l’État”, c’est-à-dire concrètement par l’Office français de l’immigration et de l’intégration ». Sous peine de ne pas obtenir de titre de séjour, ou de se le voir retirer.  

La sociologue Myriam Hachimi-Alaoui et la philosophe Janie Pélabay ont analysé, dans un article de 2020, les logiques qui sous-tendent ce processus de « contractualisation de l’intégration » centré sur les « valeurs de la République », dans un contexte d’« obligations légales toujours plus fortes » imposées aux étrangers. 

« La contractualisation de l’intégration participe ainsi d’une politique de contrôle plus poussée pour certaines catégories de migrant·es, dont les caractéristiques sociales autant que les origines culturelles sont perçues comme nécessitant une attention spécifique en matière d’acceptation des “valeurs de la République”. Ce rôle de sélection est à comprendre en lien avec une autre finalité des contrats : renforcer les fondements identitaires de la communauté nationale. » 

En France, l’injonction à respecter les « valeurs de la République » vise quasi-exclusivement les étrangers, comme si les nationaux s’y pliaient naturellement. Elle tend toutefois à s’imposer dans d’autres domaines. 

La loi séparatisme de 2021 oblige ainsi les associations qui sollicitent des subventions à signer un « contrat d’engagement républicain », dans lequel elles promettent de respecter « les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, ainsi que les symboles de la République ». Elles doivent aussi s’engager à « ne pas remettre en cause le caractère laïque de la République » et « s’abstenir de toute action portant atteinte à l’ordre public », sous peine de se voir refuser ou retirer ces financements. 

Les modalités de ce « contrat d’engagement républicain » font actuellement l’objet d’un recours devant le Conseil d’État, à l'initiative d’associations et de syndicats. En juillet dernier, la coalition pour les libertés associatives a de nouveau appelé les « nouveaux et nouvelles député·es » à l’abroger. 

 


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