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Source : le monde - Olivier Bonnel, Tomas Statius - 02/06/2023

En partenariat avec « Lighthouse Reports », « El Pais », Sky News, « Domani » et « Süddeutsche Zeitung », « Le Monde » révèle les défaillances des autorités italiennes qui ont conduit à la mort de 94 personnes, le 26 février.

 

Jeudi 1er juin, dans l’après-midi, les carabiniers ont mené des perquisitions auprès du commandement régional des gardes-côtes et de la Guardia di finanza (GDF, la police douanière) de Calabre. C’est sur les rives de cette région du sud de l’Italie, plus précisément à Cutro, une station balnéaire, que, le 26 février, le Summer Love, un navire de migrants en perdition, s’est brisé à quelques mètres du rivage, provoquant la mort de 94 personnes parmi lesquelles 35 mineurs. Six personnes font l’objet d’une enquête, parmi lesquels trois responsables de la Guardia di finanza, l’identité des trois autres n’ayant pas été dévoilée. Tous sont accusés de ne pas avoir empêché le drame. « Il y aura un procès pour le naufrage de Cutro », se félicite Francesco Verri, l’un des avocats des familles des victimes. « L’Etat a des responsabilités claires, le parquet de Crotone les établira et traduira les coupables devant le juge », veut-il croire.

 
 
 
 
 
 

Comment expliquer que le bateau, répéré le 25 février dans la soirée par Frontex, l’agence européenne de gardes-côtes et de gardes-frontières, alors qu’il était encore à 70 kilomètres des côtes italiennes, n’ait fait l’objet d’une opération de sauvetage que six heures plus tard ?

 

Au terme de plusieurs mois d’enquête, Le Monde, ses partenaires de Lighthouse Reports, d’El Pais, de Sky News, de Domani et de la Süddeutsche Zeitung, sont en mesure d’établir les circonstances exactes de ce naufrage, grâce à des documents confidentiels, appuyés par les témoignages d’une vingtaine de survivants et l’analyse de vidéos exclusives, qui contredisent la version du gouvernement italien.

D’après nos informations, dès le 25 février, soit la veille du naufrage, Rome avait connaissance d’éléments qui auraient dû conduire au déclenchement des secours. Parmi ces indices, la présence de migrants à bord, la probable surcharge du bateau ajoutée aux conditions météorologiques. Contactés par Le Monde, ni les gardes-côtes, ni les douanes, ni le bureau de la première ministre italienne n’ont donné suite à nos demandes d’interviews.

 
 
 
 
 
 

« Les bateaux qui transportent des réfugiés, des demandeurs d’asile et des migrants sont invariablement surchargés et peu adaptés à un long voyage, surtout si la mer est agitée, établit une recommandation de la Cour européenne des droits de l’homme en 2019. Il en découle qu’ils devraient être considérés comme des bateaux en détresse dès qu’ils quittent leur point de départ. » « Si l’on applique cette règle à notre cas, il semble évident que l’Italie a violé cette recommandation européenne », accuse l’avocat Francesco Verri.

« L’intervention des secours aurait dû être déclenchée »

Contrairement à ce que soutient le gouvernement italien, plusieurs fois avant le naufrage, Frontex, dont les avions patrouillent dans la zone, a averti les autorités locales sur la présence possible de migrants à bord du Summer Love. L’agence européenne en fait état dans un rapport confidentiel adressé plusieurs heures avant le naufrage à une dizaine de destinataires, dont le ministère de l’intérieur et les gardes-côtes italiens.

D’après ce document, grâce à un appareil d’interception des appels passés depuis un téléphone satellitaire, Frontex suivait le Summer Love en pleine mer, alors que le capitaine appelait la Turquie. Selon ce rapport, le pilote d’Eagle 1, l’avion chargé de la surveillance du bateau, a alerté les autorités italiennes au sujet de la violence du vent huit heures avant le naufrage. L’Italie avait également accès aux images tournées en direct par l’avion.

 
 
 
 
 
 
Un document interne de Frontex montre que contrairement à ce qu'affirment les autorités italiennes, elles avaient conscience de la présence de migrants à bord.

 

« Ces éléments auraient dû déclencher l’intervention des secours », estime un officier supérieur de la Guardia costiera (GC) souhaitant garder l’anonymat. Pour ce dernier, l’incident repose en grande partie sur une erreur d’appréciation de la part de ses collègues de la GDF. « Dans le cas de Cutro, un flou a permis de dire à la GDF : “C’est nous qui gérons, car il s’agit d’une opération de police”, alors que le principe de précaution aurait dû prévaloir. S’il existe la moindre probabilité, même minime d’un naufrage, il faut se donner les moyens de lancer une opération de sauvetage. » Il déplore un « court-circuit » qui a conduit à la catastrophe.

Sur les vidéos, une embarcation surchargée

Le voyage du groupe de migrants vers la mort sur la côte calabraise a débuté le 22 février sur les rives turques. Ce jour-là, à 3 heures du matin, un groupe de près de 200 demandeurs d’asile embarque sur un navire de plaisance depuis la péninsule de Çesme, en face de l’île grecque de Chios.

Une fois en mer, le bateau, qui bat pavillon turc, montre rapidement des signes de faiblesse avant de s’arrêter net, au petit matin. « Il était vraiment trop petit », se souvient Nigeena Mamozai, une jeune Afghane de 22 ans qui a perdu son mari dans le naufrage. Les passeurs font venir une seconde embarcation, le Summer Love, sur laquelle ils font monter le groupe des migrants vers 10 heures du matin. Ce dernier n’est pas beaucoup plus grand que son prédécesseur. Des vidéos tournées à bord, obtenues et authentifiées par Le Monde et ses partenaires, montrent que l’embarcation est surchargée.

 
 
 
 
 
 
Conçu pour accueillir une vingtaine de passagers, le bateau abritait cette nuit-là près de 200 personnes à bord. 

Pendant deux jours, le bateau va pourtant faire route vers l’Italie. Le 24 février, aux alentours de 14 heures, le moteur s’arrête à nouveau. « Les passeurs disaient qu’ils devaient l’arrêter parce qu’il était en surchauffe », se souvient Nigeena Mamozai.

Le 25 février, en fin de journée, les passagers entendent des bruits sourds. Comme les hélices d’un hélicoptère ou le vrombissement d’un avion. Le vent se lève. A 22 h 26, Frontex signale aux autorités italiennes la présence d’« un bateau non identifié » (en réalité, le Summer Love), dans la zone de recherches et de secours (SAR) italienne, par une mer de force 4 avec des vagues de 1,25 mètre à 2,5 mètres.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Migrants : en Italie, la « guerre » du gouvernement contre les ONG
 

La météo ne cesse ensuite de se dégrader. A 3 h 30 du matin, deux vedettes de la police douanière, parties intercepter l’embarcation, doivent rebrousser chemin. « Compte tenu des conditions météorologiques difficiles et de l’impossibilité de poursuivre [leur mission] en toute sécurité, les unités sont retournées à leur base d’amarrage », lit-on dans un rapport du commandement régional de la GDF. Aucun mayday, message d’alerte demandant le sauvetage immédiat du navire, n’est émis par le centre de commandement des gardes-côtes basé à Rome.

Ce n’est qu’à 4 heures du matin, le 26 février, que ces gardes-côtes déclenchent une opération de sauvetage. Mais il est déjà trop tard. A bord, les passeurs ont remis le moteur en marche, mais ils dévient de leur route vers la plage de Cutro, plus au nord. Le Summer Love vient heurter un haut-fond, provoquant la rupture de la coque, selon le récit fait le 7 mars devant le Parlement par le ministre de l’intérieur, Matteo Piantedosi, invité à s’expliquer devant les députés sur les circonstances du naufrage.

Des questions sur le cadre d’intervention de Frontex

De son côté, l’agence Frontex nie toute erreur de jugement et soutient avoir scrupuleusement respecté son mandat : alerter les autorités italiennes, qui sont seules à être investies de la responsabilité de lancer une opération de sauvetage. « Cette décision est entre les mains des autorités nationales », précise le service de presse de Frontex.

 

S’ils engagent la responsabilité des autorités italiennes, les documents obtenus par Le Monde et ses partenaires soulèvent aussi des questions sur le cadre d’intervention de Frontex en Italie. Dans un manuel présentant les opérations de l’agence au large de la Péninsule, les analystes de Frontex soutiennent que la « route » entre la Turquie et l’Italie, celle empruntée par les passagers du Summer Love, est « la plus sûre du moment » puisque aucun décès n’y est à déplorer selon le document. Une assertion contredite par les observations du Haut-Commissariat aux réfugiés, qui a enregistré vingt-cinq sauvetages de bateaux en route vers l’Italie pour la seule année 2022. Au sein de cet échantillon, deux naufrages ont eu lieu, dans lesquels ont péri au moins 36 personnes. L’agence a-t-elle aussi sous-estimé le risque ? Contactée par Le Monde et ses partenaires, cette dernière n’a pas répondu sur ce point.

 

Dans le même document, Frontex constate aussi une nette augmentation des tentatives de traversée de la Méditerranée à partir de la Turquie et à destination de l’Italie (+ 102 % en 2022 par rapport à 2021) en raison du renvoi de plus en plus fréquent des demandeurs d’asile en Grèce. Enfin, l’agence suggère de détecter la présence des bateaux tentant la traversée le plus tôt possible, regrettant que les passeurs arrivent souvent à s’enfuir avant l’arrivée de la police. C’est justement la voie qu’a empruntée l’Italie en considérant le bateau comme une cible à appréhender plutôt que comme un navire à secourir.

(Enquête réalisée avec la contribution d’Abbas Azimi, Sara Creta, Bashar Deeb, Youssef Hassan Holgado, Maud Jullien, Lena Kampf, Kristiana Ludwig, Maria Martin, Siobhan Robbins, Jack Sapoch, Simon Sales Prado, Dorothee Thiesing, Klaas van Dijken, Daniel Verdu, Lola Hierro)

 

 


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