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La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

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Source : Marianne - Pierre Coudurier - 04/09/2021

À l'initiative de plusieurs associations, des centaines de sans-abri ont installé leur campement face à la préfecture d'Île-de-France, dans le 15e arrondissement de Paris. Parmi eux, des réfugiés venus des quatre coins d'Afghanistan. Reportage.

Nul besoin d’aller jusqu’à Kaboul pour observer les conséquences du drame humanitaire qui s’y joue depuis maintenant plusieurs décennies. Dans le très cossu 15e arrondissement de Paris, un campement de fortune qui grossit à vue d'œil a été installé le 1er septembre sous les fenêtres de la préfecture de la région Île-de-France.

À l’origine de cette initiative symbolique : le « Collectif Réquisitions », qui regroupe plusieurs associations comme Utopia 56, créée en 2015 pour venir en aide aux migrants. En novembre, cette dernière avait d'ailleurs installé un campement de 450 migrants sur la place de la République. Ce jeudi 2 septembre en fin de matinée, alors que des migrants subsahariens entament une partie de football sur une pelouse impeccable, Yann Manzi, le directeur d'Utopia 56, tout de noir vêtu, encadre les opérations. « Notre objectif est de rendre visible les invisibles indique-t-il à Marianne. Il y a 400 000 logements vacants à Paris, et nous demandons qu’ils soient réquisitionnés. L’abandon des pauvres est le symbole d’un manque de volonté politique. »

« Toute ma famille a été assassinée »

Habituellement prisé des badauds pour ses visites en montgolfière, l’écrin de verdure du parc Javel-André Citroën s’est donc transformé en terre d’accueil pour 700 personnes, selon les associations – un millier d’après la préfecture. Parmi eux, environ 150 Afghans qui errent le long de leurs tentes sagement alignées.

 

Attiré par une distribution de sandwichs rudimentaires, Said Akhbar, d’origine pachtoune, raconte s’être installé la veille aux côtés de deux très jeunes Afghans qui disent avoir 17 ans. Aujourd'hui âgé de 29 ans, Said a quitté son pays il y a deux ans, de peur d’être enrôlé dans le djihad. Cet ancien habitant de Kandahar, fief historique des insurgés, est visiblement exténué. Il lui a fallu dix-huit mois pour arriver en Europe au terme d'une traversée longue et difficile. « Toute ma famille a été assassinée, alors je suis venu à pied ici en passant par l’Iran, la Turquie et l'Italie », expose-t-il sans sourciller.

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Pour ce jeune homme qui a enchaîné les épreuves, la France n’aurait dû être qu’une étape avant de rejoindre l’Angleterre. Mais son rêve insulaire s’est heurté à la police aux frontières (PAF) aux environs de Calais. Après plusieurs demandes d'asile, il a finalement obtenu son statut de réfugié en France, en avril. « Je vais avoir une formation de six mois pour apprendre la langue française, puis je veux devenir agent de sécurité et enfin tourner la page ».

L'homme n'a néanmoins pas tiré un trait définitif sur l'Afghanistan. Sur son téléphone, il montre des échanges de messages en dari, l'une des deux langues principales du pays, avec ses amis restés sur place qu'il essaie d'aider. « Ils crèvent tous de peur face aux talibans, explique-t-il. Tout ça, c’est la faute du Pakistan qui les soutient. » Said insiste alors à plusieurs reprises pour que l'on mentionne ce dernier point. Si pour lui, le premier obstacle de l'obtention d'un titre de séjour est franchi, tout reste encore à construire, ou plutôt à reconstruire.

Ballotés de camps en camps

Un peu plus loin, Sultan et Faruh sont prostrés sous un arbre. Tous deux sont d’origine tadjike, comme un quart de la population afghane. Venus de Kunduz, une ville du nord du pays, tombée entre les mains des talibans en 2015, ces deux jeunes hommes semblent ne connaître que trop bien la vie sous le joug islamique. « On ne mérite pas ce qu'il nous arrive », lâche Sultan dans un anglais hésitant.

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Passé par l’Allemagne avant d’arriver en France, il craint d'être « dubliné » si la police l'attrape. Le fameux « règlement de Dublin » limite l'instruction de la demande d'asile d'une personne à la justice d'un seul pays européen, en l'occurrence celui dans lequel il a été recensé en premier. « Je ne sais pas où aller, poursuit Sultan. Nous sommes à la rue et n’avons aucune idée de quoi faire. Personne ne nous aide. »

Ballottés de camps en camps, ces deux jeunes gens disent n'avoir que de très minces espoirs en l'avenir. Le réconfort d'un thé chaud apporté par les militants associatifs leur fait tout de même du bien. Ces derniers se proposent ensuite de les aider dans leurs démarches auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).

Impuissance des pouvoirs publics

Si les conditions sanitaires ne sont pas aussi dramatiques que dans la jungle de Calais, elles pourraient néanmoins empirer compte tenu de l'absence d'infrastructures adéquates. Seules trois toilettes sont disponibles et aucune douche.

Philippe Goujon, le maire (LR) de l’arrondissement, se dit quant à lui impuissant face au problème. « Je ne dispose ni de moyens techniques ni de personnel suffisant pour m’occuper d'eux, indique-t-il à Marianne. Des solutions vont être mises en place par la préfecture pour reloger certains, mais malheureusement, il ne suffit pas d’occuper un territoire pour prendre tout le monde en charge. » Pourtant, selon Nikolai Posner, chargé de communication d'Utopia 56, « le gouvernement veut éviter de laisser des Afghans dans la rue compte tenu de l'actualité ».

Allongé au soleil, Mohammad Nazir a laissé femme et enfants il y a deux ans. Il a traversé l’Iran, la Turquie et les Balkans avant d'atterrir à Metz. D’origine pachtoune, cet homme de 25 ans habillé d'un pantalon et d'un sac à dos militaire, arbore le drapeau national afghan enlacé autour de son poignet. « Les talibans nous considèrent comme de mauvais musulmans car nous avons fui le pays. Même s’ils disent que nous ne craignons rien, personne ne les croit. Avec eux, de toute manière, on tire d’abord et on pose les questions ensuite » enrage-t-il. Cette colère laisse finalement place à la tristesse. « Les banques sont fermées donc je ne peux plus envoyer d'argent à mon frère, déplore-t-il. De toute manière je ne sais plus où il est car Internet ne fonctionne plus. »

Espoir

D’autres Afghans comme Bashir Kamawal ont été menacés de mort en personne par les talibans. Ce journaliste a travaillé pendant douze ans pour la chaîne de télévision Ariana TV à Kaboul. Outre ce passé professionnel, les nouveaux maîtres de Kaboul lui reprochent son activité de musicien et ont menacé de l'exécuter. Un avertissement à prendre au sérieux quand on sait qu'il y a quelques jours, un musicien folklorique, Fawad Andarabi, a été exécuté d'une balle dans la tête au nord de Kaboul, selon une déclaration de son fils à l’agence Associated Press.

Arrivé en 2010, Massoud Tahai, lui, parle bien le français, il est mécanicien. « Un jour, les talibans m'ont demandé de les aider à réparer leurs voitures, raconte-t-il. Puis ils sont revenus et j'ai refusé. C'est alors qu'ils m'ont violemment frappé et que j'ai fui l'Afghanistan. » L'homme, qui arbore un t-shirt PSA, montre fièrement son titre de droit d'asile. La situation de Massoud, dont le prénom signifie « prospère », reste précaire même si elle s'est un peu améliorée ces dernières années. S'il travaille aujourd'hui en intérim dans l'usine de montage à la chaîne à Poissy, il n'a toujours pas de logement.

 

 


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