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Source : InfoMigrants - Marlène Panara - 21/01/2022

Participer aux réunions parents-professeurs, aider ses enfants à faire leurs devoirs ou comprendre un mot dans le carnet de liaison : des actes banals dont sont pourtant privés les exilés ayant des difficultés en français. Pour parer à cette situation, plus de 400 établissements scolaires en France dispensent des cours de langue de tout niveau dédiés aux parents d'élèves, dans le cadre du programme "Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants" (OEPRE). Reportage dans une école du 20e arrondissement de Paris.

"Qui veut un autotest ?". Anthony Zumaglini dépose quelques sachets en plastique sur une table ronde. "Amel tu en as assez pour les enfants ?". La jeune femme acquiesce en souriant et range précieusement l’objet dans son sac à main. Amel et ses camarades ne sont pas venus dans cette salle de classe de l’école Le Vau, située dans le 20e arrondissement de Paris, pour parler crise sanitaire. Mais avant que ne commence le cours de français, Anthony et Sarah, les deux enseignants qui dirigent la séance, prennent quelques minutes pour s’enquérir de la situation de chacun. "C’est aussi ça l’OEPRE. Au-delà de l’enseignement, on crée aussi du lien", assure le professeur des écoles.

Chaque semaine, le lundi et le jeudi, une quinzaine de personnes se réunissent dans sa classe pour participer au programme Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants (OEPRE). Proposé par 400 établissements en France – écoles, collèges ou lycées – il permet à tout parent d’élève d’apprendre ou d’approfondir sa connaissance du français.

 

La lecture fait partie des apprentissages proposés par le programme OEPRE. Crédit : InfoMigrants
La lecture fait partie des apprentissages proposés par le programme OEPRE. Crédit : InfoMigrants

"On s’est rendu compte que les enfants dont les parents ne parlaient pas français avaient souvent plus de difficultés à l’école que les autres, explique Anthony, qui donne des cours d’alphabétisation depuis 2004. Avec les séances OEPRE, c’est tout un monde qui s’ouvre aux parents : ils peuvent assister aux réunions avec les professeurs, interagir avec eux, et mieux comprendre le fonctionnement du système scolaire. Surtout, ils sont capables d’aider leurs enfants pour les devoirs. Et participent à l’objectif principal du programme : la réussite des élèves".

"Même ABCD, c’était compliqué"

Youssef, 10 ans, s’installe à l’écart, sort sa trousse et un cahier. Amel aussi. Mère et fils viennent ensemble à la séance de ce jeudi, mais chacun ses devoirs. À son arrivée en France en 2019, cette Égyptienne de 32 ans ne parlait pas un mot de français. Depuis, elle a obtenu un Diplôme d’études en langue française (DELF) de niveau A2. Aujourd’hui, elle prépare le niveau B1, celui demandé pour obtenir une naturalisation notamment. Aux côtés de Rose, ancienne professeure de mathématiques en Syrie installée en France depuis fin 2016, Amel se plonge dans l’exercice de compréhension distribué par Anthony.

Sa camarade, divorcée et mère de trois enfants, remonte ses lunettes à montures dorées sur le nez et lit en silence le même exercice. De temps en temps, elle souligne un mot, en entoure un autre au crayon à papier. Comme pour mieux s’imprégner du texte – des offres d’emploi – elle plisse ses yeux verts surmontés de longs faux cils noirs. La concentration est palpable dans la salle de classe.

Seule la voix d’Oumou, 42 ans, brise un peu le silence. "La salade de tomates". "Tu as une moto". La lecture est fluide, le ton posé. Originaire de la région de Kayes, à l’ouest du Mali, Oumou n’est jamais allée à l’école et n’a pas appris le français. Mais plusieurs années après son arrivée en France, en 2001, elle se lance. Et s’inscrit aux séances OEPRE d’Anthony "pour comprendre les réunions parents-profs". "J’ai appris à écrire ici. Dans cette école, celle de mes enfants, raconte-t-elle. C’était très difficile au début. Pour des personnes comme Amel et Rose, qui ont déjà suivi une scolarité ailleurs, c’est plus simple. Moi, je suis vraiment partie de zéro. Même ABCD, c’était compliqué".

 

À son arrivée en France, Oumou ne parlait pas français. Et elle ne savait ni lire ni écrire. Crédit : InfoMigrants
À son arrivée en France, Oumou ne parlait pas français. Et elle ne savait ni lire ni écrire. Crédit : InfoMigrants

Oumou lève la tête vers le tableau blanc en face d’elle et reprend : "Bruno va au marché". "Parfait ! répond Anthony. Tu peux écrire maintenant". La Malienne ouvre un grand cahier. Sur ses pages, des phrases écrites avec des lettres parfaitement dessinées se succèdent, une ligne sur deux. À l’aide d’un stylo, elle poursuit le travail entamé lors des séances précédentes. Ses nombreux bracelets s’entrechoquent sur la table, mais ne perturbent en rien la fluidité de son geste. L’enseignant tourne les talons et se dirigent vers Rose et Amel. "Alors, on en est où ? Ça m’a l’air très bien tout ça !".

"Voici ? What does it mean ?"

À plusieurs reprises, des rires se font entendre. Ils viennent de l’autre côté du mur, où Sarah a pris place dans sa salle de classe habituelle. Assise sur un bureau, elle fait face à Ramy* et Fayza*. "On réécoute ? Allez, on le refait une fois". L'institutrice relance la séquence audio sur le poste de radio. Ses deux élèves prêtent une oreille attentive et s’impliquent avec énergie. Le thème de l’exercice de compréhension orale : "faire connaissance". La consigne ? "Soulignez les phrases que vous entendez".

"Voici ? What does it mean [qu’est-ce que ça veut dire, en français] ?", demande Ramy à Sarah. "Voici, c’est ‘this is’". En guise d’acquiescement, il dévoile un large sourire. Cet Égyptien de 42 ans a quitté Le Caire en 2020. À cause des "problèmes politiques" qu’il a connu dans le journal où il travaillait au service publicité.

"On est parti aussi pour donner une meilleure vie à nos enfants, ajoute Fayza, son épouse. En Égypte, il faut payer cher pour entrer dans les meilleures écoles. En France, c’est plus accessible". Aujourd’hui, les trois enfants du couple sont scolarisés à Paris. Mais le quotidien reste "très dur", avoue Fayza, qui perd immédiatement son sourire.

>> À (re)lire : Paris : à "l'école des sans école", les mineurs non reconnus retrouvent le chemin de la scolarité

Il est 19h, c’est la fin du cours. Ramy et Fayza plient rapidement les photocopies distribuées par Sarah. Ils vont rejoindre leurs enfants dans la chambre d’un hôtel social où ils sont hébergés par le 115, comme la plupart des élèves de Sarah et Anthony, et leurs enfants. La semaine prochaine, "on devra encore faire nos bagages et changer d’endroit", soupire Fayza en regardant son mari. Mais ils ne manqueront certainement pas, lundi et jeudi prochain, leur cours de français.

*Les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés.

Pour profiter du programme OEPRE, un seul critère est exigé : être parent. Vous n'êtes pas dans l'obligation de suivre les cours dans l'école où est scolarisé votre enfant. Renseignez-vous auprès de votre mairie.

 


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