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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : Le monde - Flora Genoux - 02/02/2022

Avec l’arrivée massive de Vénézuéliens fuyant la situation humanitaire désastreuse dans leur pays, le Chili fait face à une crise migratoire inédite, sur fond de xénophobie.

« Ça suffit. Plus d’immigrés délinquants. Fermeture des frontières. » Rassemblées derrière une longue banderole noire, plusieurs milliers de personnes ont manifesté dimanche 30 janvier à Iquique, dans le nord du Chili. Cette ville côtière est devenue, depuis 2020, un point de transit pour les migrants vénézuéliens traversant à pied, de façon irrégulière, la frontière qui sépare le Chili de la Bolivie. Faute de structures d’accueil, ils campent sur la plage ou dans la rue, dans des conditions de grande précarité, au terme d’un parcours migratoire éreintant.

En marge du rassemblement, des manifestants s’en sont pris à un abri de migrants – absents lors de l’incident – au rythme de cris xénophobes, selon BBC Mundo. Des images de la télévision chilienne T13 ont montré des policiers faisant barrage afin de protéger un migrant assis sur la plage. Un Vénézuélien a été frappé par des manifestants.

Lundi 31 janvier, encore, la ville a été marquée par des manifestations : des camionneurs et des chauffeurs de taxi ont bloqué les accès routiers afin de protester contre la délinquance et l’immigration. Au mois de septembre 2021, déjà, des manifestations émaillées de violences et d’insultes racistes avaient choqué l’opinion.

Policiers agressés par des migrants

Ce nouveau rassemblement fait suite à l’agression de policiers d’Iquique par des migrants vénézuéliens, mardi 25 janvier. Symptôme du climat électrique entourant la crise migratoire, ce qui aurait pu n’être qu’un fait divers local a très rapidement été relayé, poussant le président élu, Gabriel Boric (gauche), à s’exprimer dès le lendemain de l’agression : « C’est inacceptable », a-t-il affirmé, assurant vouloir « éradiquer la délinquance et le narco [trafic] des rues ». Le gouvernement sortant de Sebastian Piñera (droite) a annoncé l’expulsion des migrants accusés de l’agression.

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En parallèle, le procureur de la région de Tarapaca (dont Iquique est la capitale) a dévoilé, vendredi 28 janvier, les chiffres de la délinquance de 2021, qui montrent une augmentation de 183 % des homicides, de 42 % du trafic de drogue et de 501 % du trafic de migrants. Lors de la présentation, la montée de la délinquance a été associée à l’immigration : « L’essor des délits associés au crime organisé (…) est aggravé par la perméabilité [des] frontières, favorisant une augmentation massive de la migration irrégulière. »

« Depuis un an environ, il y a une poussée de la xénophobie, avec une tendance à lier la délinquance à l’immigration, notamment vénézuélienne », remarque Patricia Rojas, présidente de l’Association vénézuélienne au Chili, qui promeut les droits des migrants. « Les manifestations contre la délinquance sont légitimes et la ville d’Iquique est totalement débordée », complète-t-elle. Le Service jésuite aux migrants (SJM) a épluché les chiffres officiels : « Il n’existe pas de preuves que l’augmentation de migrants résidant au Chili soit associée à une augmentation des délits », stipule un rapport de septembre 2020. En juillet 2020, les étrangers purgeant une peine de prison représentaient 6 % de la population carcérale. Avec environ 1,5 million de résidants venant d’un autre pays, pour 19 millions d’habitants, ils représentent près de 8 % de la population chilienne. « 99,8 % des migrants présents au Chili ne sont pas en prison », calcule le rapport.

Ces débats surviennent alors que l’immigration a explosé ces dernières années au Chili. Entre 2017 et 2020, le nombre d’étrangers en situation régulière a quasiment doublé. Un durcissement des lois migratoires, impliquant, entre autres, l’obligation d’un visa pour les Vénézuéliens, qui en étaient jusque-là exemptés pour entrer au Chili, a eu pour effet de grossir les rangs des immigrés illégaux fuyant une situation humanitaire désastreuse dans leurs pays d’origine. Selon la SJM, 86 % des demandes des visas dits de responsabilité démocratique (visa d’un an, prolongeable une fois pour une année supplémentaire), destinés aux Vénézuéliens, ont été rejetées entre avril 2018 (date de sa création) et septembre 2021.

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Sans registre officiel, il est impossible d’évaluer avec exactitude le nombre de personnes traversant la frontière chilienne. Mais, selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, entre 400 et 500 migrants vénézuéliens arrivent au Chili chaque jour depuis novembre 2021.

Sentiment d’abandon

Avec ces manifestations, « le Chili envoie une image terrible de lui-même. Mais il faut aussi regarder ce qu’il y a derrière : les personnes accueillantes se sentent totalement abandonnées. La responsabilité revient aux autorités publiques », affirme Francisca Vargas, directrice de la Clinique juridique des migrants et réfugiés de l’université Diego Portales, qui forme les étudiants à l’accompagnement des migrants. « Il manque des centres d’accueil et une politique organisée », renchérit Macarena Rodriguez, présidente du directoire du SJM, tandis que les associations dénoncent le manque d’articulation entre les municipalités et le pouvoir central, à Santiago.

Les migrants transitant à Iquique s’empressent, pour beaucoup, de rejoindre la capitale, à la recherche d’un travail, inévitablement informel, sans permis de séjour. Ceux qui ne disposent pas d’un pécule ou d’un réseau de proches pouvant les héberger dorment sous des tentes, dans la rue. « On déplace le problème d’une ville à une autre, déplore Patricia Rojas. Il est important de créer des espaces d’accueil dignes, car sans cela, on crée des ghettos qui sont le terreau de la délinquance. »

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Dans ce contexte, la crise migratoire s’est imposée, à droite, comme un thème de campagne lors des élections de novembre et décembre 2021. Le rival déchu de Gabriel Boric, José Antonio Kast (extrême droite), avait proposé la construction d’un fossé à la frontière nord. Le président élu, Gabriel Boric, qui prendra ses fonctions en mars, prône, lui, un registre des migrants et une politique « fondée sur les droits humains » ainsi qu’un « contrôle des frontières qui évite l’immigration irrégulière ». Mais la question migratoire n’était pas au centre de son programme, davantage tourné vers l’obtention de nouveaux droits sociaux. Ses propositions « restent encore génériques, il faut maintenant des idées concrètes », observe Francisca Vargas. « Ce sont des situations graves et complexes. Nous souhaitons gouverner de façon différente face à ces situations », a récemment déclaré la porte-parole du prochain gouvernement, Camila Vallejo, sans livrer plus de détails.

 


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