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La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

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Source : Le Monde - Marina Rafenberg(Athènes, correspondance) - 09/03/2022

En Grèce, où près d’un million de personnes avaient débarqué sur les îles de la mer Egée en 2015, cette nouvelle crise humanitaire a une résonance particulière. Certains migrants arrivés dans le pays il y a quelques années sont partis aider les civils qui fuient l’invasion russe.

« Je comprends la douleur des réfugiés ukrainiens, moi aussi j’ai fui mon pays, la Syrie, j’ai laissé derrière moi ma famille, mes amis, sans savoir quand je les reverrai… » Le 28 février, Omar Alshakal, 28 ans, installé sur l’île grecque de Lesbos où il a fondé son ONG Refugee 4 Refugees, prend un avion direction Suceava en Roumanie avec trois bénévoles, un Irakien, un Marocain et une Norvégienne. « Je ne pouvais pas rester les bras croisés, je voulais apporter ne serait-ce qu’un sourire, de la nourriture ou des vêtements chauds aux Ukrainiens qui fuient les bombes », explique le jeune homme originaire de Deir ez-Zor, ville du nord-est syrien.

A son arrivée en Roumanie, la neige et un vent glacial l’attendent. « Il fait  1 °C, il y a beaucoup de femmes et d’enfants qui marchent dans le froid et attendent pendant plus de vingt heures avant d’arriver du côté roumain », relate Omar Alshakal dans une vidéo postée sur son compte Facebook. Ces images de familles apeurées, désemparées, affamées lui rappellent des souvenirs, celles des « routes de l’exil qui malheureusement se ressemblent ».

En 2013, la vie d’Omar Alshakal bascule. L’opposant au régime de Bachar Al-Assad, qui a déjà séjourné dans les geôles syriennes, conduit une ambulance près de Deir ez-Zor quand une bombe s’écrase près du véhicule. Il s’en sort, blessé à la jambe. Les autres passagers ne survivent pas. S’ensuit la route de l’exil. En Turquie, il tente de se faire soigner et de reprendre des forces. Puis, en 2014, il entreprend une traversée périlleuse vers la Grèce. Maître-nageur de formation, il décide de nager jusqu’à l’îlot de Pserimos, au large de Kalimnos, pendant quatorze heures ! Il est repêché par des garde-côtes grecs stupéfaits. Son parcours le mène finalement jusqu’en Allemagne.

En 2016, les canots continuent d’affluer sur les îles grecques et la vie des migrants se complique avec la fermeture des frontières et l’accord entre l’Union européenne et la Turquie qui leur interdit de quitter les îles le temps de l’étude de leur demande d’asile. Omar Alshakal dit avoir voulu alors se « sentir utile ». Il revient faire du bénévolat avec plusieurs ONG puis finit par monter la sienne en 2017.

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A Lesbos, où il travaille depuis, il pense que « l’humanité s’est perdue derrière les barbelés ». Depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement conservateur en 2019, la politique migratoire en Grèce s’est durcie, les demandeurs d’asile étant au fur et à mesure isolés dans des camps fermés auxquels les ONG et les médias ont un accès limité. Surtout, selon plusieurs enquêtes, les refoulements illégaux et violents de migrants aux frontières maritimes et terrestres de la Grèce se multiplient, d’où la baisse significative des arrivées depuis 2020.

« Politique migratoire à deux vitesses »

« Cette nouvelle crise migratoire devrait remettre en question toute la manière dont nous traitons les réfugiés. Nous ne pouvons pas avoir en Europe une politique migratoire à deux vitesses, l’une pour les Ukrainiens et une autre pour les exilés venant des pays du Moyen-Orient ou d’Afrique… », constate le jeune Syrien.

Depuis le poste-frontière de Siret, en Roumanie, il salue l’élan de solidarité. « De nombreux volontaires, des simples citoyens sont venus aider. Malheureusement, nous avons entendu beaucoup de témoignages d’Indiens, de Marocains, de Syriens, d’Africains, qui fuient l’Ukraine et qui ne sont pas accueillis avec le même enthousiasme. C’est ce qui m’a poussé aussi à venir ici pour porter main-forte à tout le monde sans distinction », assure-t-il.

Sur les réseaux sociaux, Omar Alshakal est pourtant interpellé : « Est-ce vraiment nécessaire que tu ailles là-bas ? Il y a déjà beaucoup d’organisations sur place. »

En 2015, Lesbos était devenue l’épicentre de la crise migratoire. La guerre en Syrie avait amené près d’un million d’exilés à traverser la Grèce. Les ONG s’étaient multipliées, les volontaires débarquaient de manière anarchique et appelaient aux dons sur Internet, créant la méfiance des insulaires.

Coordination chaotique

A ses détracteurs, Omar Alshakal répond : « Il y a beaucoup d’aides, de dons et de bénévoles, mais la coordination est encore chaotique. » Il s’émeut par exemple de voir la nourriture ou les vêtements laissés dehors sous la neige. « Il faudrait construire un hangar pour pouvoir les déposer et les distribuer à l’abri. Je me suis entretenu avec le maire et des ONG locales pour voir si nous pouvons avancer sur ce projet », souligne-t-il.

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Il n’est pas le seul à avoir fait le trajet depuis Lesbos. Sonia Nandzik, cofondatrice de l’ONG ReFOCUS Media Labs, s’occupe de former au journalisme des exilés sur l’île grecque et de les connecter avec des rédactions de médias internationaux. Ces derniers jours, elle est venue documenter la crise migratoire à la frontière polonaise et repérer les journalistes ukrainiens qui voudraient continuer à exercer leur métier en Europe. Les jeunes Afghans avec qui elle travaille habituellement ne pouvaient pas faire le voyage, mais ils éditeront des vidéos et des podcasts avec le matériel récolté à son retour. « Il est très important pour eux de partager leur histoire, d’informer sur ce qu’il se passe dans leur pays, mais aussi de mettre leur vécu à contribution pour pouvoir raconter d’autres récits d’exilés », estime Sonia Nandzik.

A Lesbos, au fil des mois, la diminution du nombre d’arrivées sur les îles, la moindre médiatisation et les restrictions accrues de la part du gouvernement grec, face aux dénonciations incessantes de refoulements illégaux et de mauvais traitements infligés aux réfugiés, ont décidé de nombreuses ONG à plier bagage. Athènes, semble-t-il, souhaiterait accélérer ce mouvement de départ : « Il serait bien que les ONG qui se trouvent sur nos îles partent en Ukraine pour aider face à la crise humanitaire, a suggéré le ministre du tourisme Vassilis Kikilias. Là-bas, il y a vraiment des besoins immenses. »

 

 

 


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