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La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

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Source : Le monde - Laure Stephan - 18/03/2022

Au Liban, les réfugiés syriens expulsés des camps subissent de plein fouet la crise économique. La flambée du loyer et l’impossibilité de trouver un travail les contraint à une nouvelle errance.

Des neuf années que Madiane Al-Ahmad et sa famille élargie ont passées dans un camp informel à Bar Elias, dans la vallée de la Bekaa, au Liban, il ne reste que quelques pierres au sol. Ces réfugiés syriens ont été expulsés à l’automne 2021, après un différend entre les propriétaires du terrain. Les déplacés – trente-cinq personnes – ont trouvé abri dans un entrepôt vide, proche de l’ancien camp. Mais cet arrangement est menacé : ils doivent renouveler ces jours-ci le loyer, 1 200 dollars (1 085 euros) pour six mois. « Je ne sais pas comment trouver cette somme. Avec la crise au Liban, il n’y a plus de travail », soupire Madiane, 47 ans, sans emploi après avoir collaboré avec des associations d’aide aux Syriens.

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Madiane Al-Ahmad, réfugié syrien dans un entrepôt à Bar Elias, dans la vallée de la Bekaa, à l’est du Liban, le 28 février 2022, où il habite avec sa famille depuis leur expulsion d’un camp tout proche à l’automne 2021.

Face au risque d’une nouvelle expulsion, cet homme originaire de la région de Qoussair, à la frontière avec le Liban, a peu d’options hormis tenter de réduire le nombre de mensualités à payer d’avance. La famille avait été contrainte de dormir dehors, sans toit, avant de loger dans le hangar. « Nous souhaitons revivre dans un camp, comme avant : en échange du terrain, nous travaillions dans l’agriculture. Tout y était organisé. Nous avons trouvé un lieu, mais nous n’obtenons pas l’autorisation des autorités pour nous y installer », regrette Madiane.

« Le logement est devenu un défi »

Dans l’entrepôt, il vit dans une pièce avec son épouse et leurs six enfants. Ils ont fixé des bâches de plastique pour masquer l’ouverture laissée par le rideau de fer remonté à l’extérieur, afin que passe la lumière. Le réchaud à mazout fonctionne au minimum, faute d’argent. L’hiver finissant a pourtant été rude. « Ce lieu n’est pas fait pour y vivre », résume Madiane, près du tableau blanc sur lequel il donne des cours à ses enfants, non scolarisés. Leurs proches se sont aussi aménagés des espaces sommaires dans le bâtiment.

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Mahassine, une réfugiée syrienne dans son logement à Al-Marj, dans la vallée de la Bekaa, à l’est du Liban, le 28 février 2022.

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Des vêtements sèchent dans le logement de Emm Alaa’ où elle vit avec ses enfants, dans la vallée de la Bekaa, à l’est du Liban, le 28 février 2022.

Dans un pays en plein effondrement, où les prix flambent, « le logement est devenu un défi », confirme Mahassine, originaire de la banlieue de Damas, dans son petit salon d’Al-Marj, une autre localité de la Bekaa. Les réfugiés syriens sont près de 1,5 million au Liban, selon les autorités. « Le loyer augmente. En six ans, je n’ai jamais pu obtenir de contrat de location », décrit cette veuve, éducatrice pour des petits Syriens, qui a fui son pays avec ses enfants après avoir été emprisonnée plusieurs mois par le régime.

Des réfugiés sollicitent souvent cette activiste : comme Oum Alaa, 50 ans. Cette femme, séparée, fond en larmes en évoquant les épreuves qu’elle endure : un fils adolescent handicapé après avoir été blessé enfant par un obus dans la Ghouta orientale, près de Damas ; des dettes vertigineuses pour suivre l’inflation galopante ; et le loyer « qui a triplé en quelques mois, pour atteindre 1 200 000 livres libanaises [environ 53 euros, plus de deux fois le salaire minimum]. Mes fils font des petits boulots, mais ça ne suffit pas. » Désormais, le propriétaire veut récupérer l’immeuble. « Il m’a donné un sursis, car j’ai subi une opération. Nous irons dans un camp, se résigne Oum Alaa. Le loyer sera moins coûteux. »

Hausse des expulsions

En 2021, 800 cas d’expulsions de réfugiés syriens ont été répertoriés, un chiffre considéré comme sous-évalué. « On constate une hausse du phénomène, dont le principal moteur est l’incapacité à payer le loyer, note Carlo Gherardi, directeur au Liban de l’ONG Norwegian Refugee Council, médiatrice dans les litiges liés au logement. Avec la crise, la pression est très forte des deux côtés : les Libanais, logeurs, sont durement touchés, et les Syriens ont perdu leur emploi ou subissent une baisse drastique de revenus. » Avec le risque que des réfugiés soient poussés vers des habitats encore plus précaires.

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Dans le bâtiment inachevé où vivent Madiane Al-Ahmad et sa famille, à Bar Elias, dans la vallée de la Bekaa, à l’est du Liban, le 28 février 2022.

Racha et Mohamed, originaires du nord-ouest de la Syrie, tirent le diable par la queue. « L’aide que l’on reçoit [de l’ONU] est très insuffisante », se lamente Racha, 37 ans. Eux aussi ont vu augmenter le loyer de la tente où ils vivaient avec leurs trois enfants. Mais c’est une dispute avec le propriétaire du terrain qui les en a chassés. Selon eux, ce dernier a enragé lorsqu’il les a vus ramasser du bois pour se chauffer. Il a sorti une arme. Le coup, détourné, a été tiré en l’air. « Il m’a menacé de me livrer aux services de sécurité syriens si je portais plainte », affirme Mohamed.

Les relations du couple avec le propriétaire s’étaient détériorées depuis que Mohamed ne pouvait plus réaliser pour ce dernier de petits travaux, en sus du loyer. L’ouvrier explique avoir conservé de lourdes séquelles des tortures qui lui ont été infligées lors d’un passage clandestin en Syrie en 2021. Le fait qu’il n’ait pas effectué ses périodes de réserve dans l’armée lui avait valu d’être arrêté par un service de sécurité. La famille est désormais hébergée par des proches, temporairement, dans un camp informel d’Al-Marj.

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Le plus jeune enfant de Racha et Mohamed devant leur tente dans le camp de Hamdaniyeh, dans la vallée de la Bekaa, à l’est du Liban, le 28 février 2022.

« Parmi tout ce que j’ai perdu avec la guerre et l’exil, il y a le sentiment de se dire “je suis chez moi” », constate Madiane Al-Ahmad, le Syrien de Qoussair. Ici, tout est provisoire. Avec ce que nous vivons, j’ai pensé rentrer en Syrie, même si mon fils de 18 ans fera son service militaire. Mais c’est impossible : dans notre région, l’insécurité règne. Et, en Syrie, l’économie est à plat, et l’aide humanitaire encore plus faible qu’au Liban. »

 

 


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