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Source : Le monde - Mattea Battaglia et Stéphanie Wenger - 16/03/2022

Selon les derniers chiffres, 790 enfants et adolescents sont déjà scolarisés sur le sol français, mais ce chiffre doit augmenter. Les dispositifs d’accueil pour allophones sont particulièrement sollicités.

Des sourires, des regards, des paroles appuyées par des gestes ou des illustrations… Les enseignants savent bien qu’accueillir dans leur classe un élève qui ne parle pas le français – un « allophone » – passe beaucoup, au moins les premiers jours, par de la « communication non verbale ».

Pour éveiller l’attention de Yurii, 15 ans, qui fait ce mercredi 16 mars sa rentrée au lycée Paul-Valéry, dans le 12e arrondissement de Paris, Cédric Maffre, le professeur référent de l’Unité pédagogique consacrée aux élèves allophones nouvellement arrivés (une UPE2A, selon le sigle en vigueur), s’offre un « détour » par un autre levier : la musique.

Il avait prévu de faire écouter à sa classe la chanteuse Clara Luciani ; c’est d’abord du rap en russe qui résonne dans la salle du troisième étage du lycée, à l’initiative de Yurii lui-même qui, tout sourire, a mis le volume sonore à fond sur son smartphone.

Enseignement renforcé du français

Il y a encore quinze jours, l’adolescent ukrainien était scolarisé à Kiev, en « neuvième classe » ; l’équivalent d’un niveau à cheval entre la troisième et la seconde. Le voilà désormais intégré à la douzaine d’élèves – ukrainiens, donc, mais aussi bangladais, algérien, nigérian ou encore chinois – que compte ce dispositif qui mise sur un enseignement renforcé du français, à raison de 18 heures hebdomadaires, avant de renvoyer les élèves vers une classe ordinaire, explique M. Maffre. « Chacun fait à son rythme, progressivement, et seulement quand il se sent prêt. »

En attendant de l’être, Yurii prend ses marques, entouré de Kateryna, elle aussi arrivée d’Ukraine mais à l’automne, et de Laura, venue de Moldavie. Entre les trois adolescents russophones, les langues se délient. Pendant que le gros de la classe travaille sur un extrait de La Princesse de Clèves, le trio commente quelques clips vidéo. « Essayez de parler en français », leur répète leur professeur. C’est la règle en UPE2A. Mais elle souffre « quelques exceptions », concède-t-il en aparté, pour ce premier jour que Yurii passe au lycée.

Fuyant la guerre en Ukraine, ils sont à ce jour près de 790 enfants et adolescents à être déjà scolarisés sur le sol français, selon les derniers chiffres communiqués par le ministère de l’éducation. La cohorte est « raisonnable », a affirmé Jean-Michel Blanquer, à l’occasion d’un déplacement, le 15 mars, dans un établissement de l’académie de Créteil. Rapporté au total de 12,4 millions d’élèves (dont 68 000 élèves allophones, toutes origines confondues), ce chiffre ne dit pas grand-chose. Mais il va « croître dans les prochains jours », a prévenu le ministre. Alors que le gouvernement anticipe toujours l’arrivée possible de 50 000 à 100 000 réfugiés, essentiellement des femmes et des enfants, les acteurs de l’école se mettent en ordre de marche.

Inscriptions « au compte-gouttes »

« On veut être prêts à accueillir des flux importants, aussi parce que c’est ce qui ressort de nos réunions de travail avec l’ambassade d’Ukraine », avance Patrick Bloche, adjoint à l’éducation à la Mairie de Paris. La capitale ne comptabilise encore qu’une cinquantaine d’élèves supplémentaires, moitié dans le primaire, moitié dans le secondaire, autour des trois sites d’accueil (dans les 10e, 12e et 18e arrondissements) où les familles sont acheminées.

Ailleurs, les inscriptions se font aussi « au compte-gouttes », aux dires des enseignants. Leurs syndicats ont repéré les « territoires d’arrivées » – l’Ile-de-France, les Hauts-de-France, le Grand-Est ou encore les Alpes-Maritimes –, mais aussi des installations qui échappent aux trajectoires et à la cartographie attendues, ainsi qu’aux dispositifs d’inclusion prévus pour ces enfants fraîchement débarqués.

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Au lycée Paul-Valéry, dans le 12e arrondissement de Paris, une classe UPE2A qui accueille de jeunes Ukrainiens ayant fui la guerre. A Paris le 16 mars 2022.

Muriel Dion, directrice d’une école de huit classes dans un village du Loiret, ne veut pas s’en inquiéter : « On accueillera nos nouveaux élèves le plus normalement possible, même si chacun sait, dans le contexte actuel, que plus rien n’est tout à fait normal », explique l’enseignante affiliée au syndicat SNUipp-FSU. Jeudi 17 mars, quatre petits garçons – quatre cousins – devaient rejoindre son école. Trois ont l’âge de la maternelle ; l’un du CM1. Pour lui, l’équipe a préparé une « adaptation sur mesure ». « Il sera scolarisé avec des camarades de son âge, mais il pourra passer des matinées au CP, le temps d’être plus à l’aise avec le français », explique la directrice.

Gérer le traumatisme de la guerre

Ce mardi, toute la famille est venue prendre ses marques. « Les mamans ont pris des photos partout, dans les classes, dans la cour et même dans les toilettes, raconte Muriel Dion. On sentait, derrière les sourires et les mercis, le chagrin d’être séparés des papas, restés en Ukraine. Les photos, c’était pour eux… » C’est ce traumatisme-là – celui de la guerre, de la séparation –, que l’école s’apprête à devoir gérer, plus qu’un « problème de niveau », rapportent les enseignants, habitués à voir des enfants « rebondir vite » scolairement.

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Kateryna, 17 ans, a fui Odessa. Elle est aujourd’hui scolarisée au lycée Paul-Valéry, à Paris.

Au collège Joffre de Montpellier, ce sont huit nouveaux élèves (cinq arrivés d’Ukraine, trois d’Espagne) qui ont fait leur rentrée, mercredi. « Ils vont d’abord passer par un module de six semaines d’évaluation, explique M. Lozar, le principal, avant d’être répartis dans des classes. Mais ils sont déjà inscrits, en projection, soit en 4e soit en 3e. » Ailleurs, cette étape de l’évaluation se joue dans des centres académiques dits « Casnav » (centres académiques pour la scolarisation des enfants nouvellement arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs). Au collège Joffre, le plus grand de l’académie montpelliéraine, fort de trois unités UPE2A, elle est organisée in situ. De quoi nouer, sans tarder, la relation avec ces élèves. « On les a reçus en famille lundi matin, raconte le chef d’établissement. Il y avait beaucoup d’émotion. On sentait fort le besoin d’école. »

Le système scolaire est-il en mesure d’y répondre ? « Il n’est pas exclu qu’on manque de places et d’enseignants formés en UPE2A, prévient Guislaine David, porte-parole du SNUIpp-FSU, syndicat majoritaire au primaire. Ou pire : qu’on soit contraints de faire sortir prématurément de leur classe d’autres enfants allophones, des Afghans, des Syriens, pour libérer des places. »

« La moitié sans affectation scolaire »

Une inquiétude partagée dans le second degré, même loin des grandes agglomérations. « On nous annonce, dans le Cher, l’arrivée d’une centaine de réfugiés dont 74 enfants en âge d’être scolarisés, rapporte Sylvie Berger, psychologue scolaire affiliée au SNES-FSU, qui travaille au centre d’information et d’orientation (CIO) de Bourges. Or, sur la centaine de dossiers d’inscriptions que nous avons reçus, depuis septembre 2021, pour des enfants venus de l’étranger, la moitié est toujours sans affectation scolaire. »

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Salle de vie scolaire contiguë à la classe UPE2A, au lycée Paul-Valéry, à Paris (12e), le 16 mars 2022.

Dans le Bas-Rhin, pour l’instant, le rectorat a comptabilisé 36 élèves scolarisés et 17 en cours d’accueil. La majorité l’est en maternelle et élémentaire ; ce sont, dans ce cas, les mairies qui prennent la décision. Pour le secondaire, le CIO le plus proche instruit les demandes. Celui de Strasbourg a déjà commencé à recevoir les familles ukrainiennes. « D’habitude, on se retrouve à traiter la majorité des demandes, mais la plupart des Ukrainiens qui sont déjà arrivés sont accueillis dans des familles ou par des proches, explique Danielle Podmilsak, la directrice de ce centre, donc d’autres structures ont été approchées dans toute l’académie, et parfois les établissements directement. »

Mardi, la jeune Darina, 13 ans, avait rendez-vous dans ces locaux. L’adolescente a fui Kharkiv, le 26 février, avec sa mère et sa grande sœur accompagnée de son fiancé. « J’ai envie d’aller à l’école, d’apprendre le français et de me faire des amis », glisse-t-elle. On lui a dit qu’elle pourrait intégrer une classe « d’ici une à deux semaines ».

Le ministère de l’éducation, qui s’est doté d’une nouvelle « cellule » pour assurer un « suivi national » de la situation, assure, à ce stade, pouvoir répondre aux demandes. Et de marteler : « Des UPE2A, on pourra en ouvrir là où le besoin se fera sentir. »

 

 

 


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