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La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : Le monde - Audrey Sommazi, Jordan Pouille, Nathalie Stey, Claire Mayer, Richard Schittly, Benjamin Keltz, Gilles Rof, Laurie Moniez, Agathe Beaudouin et Julia Pascual - 04/04/2022

Un ferry qui héberge des réfugiés, des professeurs de russe qui reprennent du service ou un « asile sportif » pour des athlètes de haut niveau… Voyage dans la France qui participe à l’accueil des Ukrainiens.

Ils sont plusieurs dizaines de milliers. Des femmes et des enfants surtout, qui ont fui la guerre et que la route de l’exil a conduits jusqu’en France. Selon les informations du gouvernement, quelque 36 000 personnes, ukrainiennes en majorité, sont arrivées depuis le début de l’invasion russe le 24 février, sur un total de 4 millions de réfugiés ayant quitté l’Ukraine. Une partie d’entre elles n’ont fait que transiter et ont rejoint depuis qui l’Espagne, qui l’Italie, qui l’Allemagne ou l’Angleterre, où elles avaient souvent un point d’attache, une connaissance, un membre de leur famille déjà installé.

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Elisabeth Ruellan, professeure de russe à la retraite, fait lire un texte en français à une adolescente ukrainienne ayant fui son pays en raison de la guerre, à l’Institut Emmanuel-d’Alzon, à Nîmes, le 1er avril 2022.

Une autre partie de ces personnes est restée. Pour faire face au défi de leur accueil, l’Etat a promis de réunir 100 000 places d’hébergement au total. Un objectif ambitieux. A titre de comparaison, ce volume correspond au nombre de places d’hébergement que compte le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile, résultat de plusieurs années d’effort et de dépenses publiques, et qui ne permet d’héberger que la moitié des personnes en demande de protection.

Partout sur le territoire, aujourd’hui, les préfectures sont mises à pied d’œuvre pour recenser localement les capacités d’hébergement existantes et vérifier leur disponibilité. Elles vont de l’hôtel au centre de vacances, en passant par le domicile de particuliers. L’Etat veut parvenir à une répartition sur le territoire alors que l’Ile-de-France, le Grand-Est et la région de Nice sont aujourd’hui les principaux lieux d’arrivée. « Près de 70 000 places d’hébergement ont déjà été recensées, assure le ministère de l’intérieur, dont 48 517 sont disponibles et 20 710 sont occupées. » Parmi elles, 6 399 places sont le fait d’hébergements citoyens. « Il y a un décalage entre les propositions de citoyens et les possibilités d’un accueil dans la durée, prévient toutefois un préfet. Il faut absolument des propositions de logement pérennes. »

L’accueil des réfugiés ukrainiens suppose aussi de mettre en œuvre rapidement un accès à la santé, au travail ainsi qu’à la scolarisation des enfants et à l’apprentissage du français.

La protection temporaire qui a été accordée par l’ensemble des Etats-membres de l’Union européenne aux réfugiés d’Ukraine facilite leurs démarches d’insertion puisqu’elle permet l’octroi automatique d’un titre provisoire de séjour, valant par exemple en France autorisation de travail et accès à la protection universelle maladie.

Selon le ministère de l’éducation nationale, 6 873 enfants ont déjà pris le chemin de l’école, du collège ou du lycée, tandis que la ministre du travail, Elisabeth Borne, a déclaré vendredi 1er avril que plus de 600 entreprises se sont manifestées sur la plate-forme gouvernementale dédiée à l’accueil des déplacés ukrainiens avec « 7 000 propositions d’emploi », notamment dans le secteur en tension de l’hôtellerie-restauration. Là aussi, l’enjeu est de « transformer l’engagement fort des entreprises » en « solutions concrètes ».

Ces chiffres témoignent en tout cas d’un élan vers lequel convergent Etat, associations, collectivités, entreprises, particuliers. Pour raconter ces initiatives, Le Monde est allé dans l’Aveyron et le Nord, à Lyon, Vannes, Strasbourg ou Marseille, mais aussi à Nîmes et Bourges. Morceaux choisis de solidarité.

A Lyon, les anciens casques bleus se mobilisent

« Les particuliers se mobilisent vraiment, plus fortement que les institutions. Je n’ai jamais vu autant de dons arriver en si peu de temps », confie Laurent Attar-Bayrou, épaté par « l’élan de générosité envers les Ukrainiens ». Avec son association humanitaire, implantée à Lyon, l’ancien militaire a l’habitude, depuis de nombreuses années, des collectes et des colis de Noël. « La solidarité qui s’exprime depuis le début de la guerre est impressionnante », remarque le président de l’Association internationale des soldats de la paix, qui regroupe d’anciens casques bleus partout dans le monde.

L’association a récolté vêtements, couvertures, médicaments et nourriture à son siège de Lyon et auprès de mairies. Et a décidé de porter elle-même ces dons en Ukraine. « L’idée est d’entrer à l’intérieur du pays, pour donner directement à la population », précise M. Attar-Bayrou. « Les habitants de ma commune se sont montrés généreux. J’ai choisi cette association pour sa capacité à remettre les dons à ceux qui en ont vraiment besoin », explique Julien Smati, premier adjoint de Rillieux-la-Pape (Rhône), venu assister au départ.

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Laurent Attar Bayrou, président de l’Association internationale des soldats de la paix, replie le drapeau qu'il emporte, à Vaulx-en-Velin (Rhône), le 31 mars 2022. C’est le jour du départ du convoi humanitaire jusqu'à Jytomyr, en Ukraine.

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Des anciens casques bleus de l’Association internationale des soldats de la paix chargent leurs véhicules avant de partir en convoi humanitaire jusqu'à Jytomyr, en Ukraine. A Vaulx-en-Velin, le 31 mars 2022.

Cinq bénévoles, anciens soldats de la force de l’ONU, et un étudiant en master de sécurité internationale ont rempli trois fourgons de matériel et sont partis de l’entrepôt de Vaulx-en-Velin (Rhône), jeudi 31 mars au matin. Destination : la ville de Jytomyr, à environ 150 kilomètres de Kiev. Le gouverneur local leur a fourni un laissez-passer. Et un ancien casque bleu ukrainien a prévu de les guider dans le pays.

Le convoi transporte même… un carton de confitures, confectionnées par une retraitée lyonnaise, la veille du départ. Agés d’une soixantaine d’années, les anciens engagés de l’ONU ont tous servi au Liban, au pire moment des années 1980. Bérets bleus vissés sur la tête, ils veulent donner une portée symbolique à leur convoi humanitaire. « D’anciens casques bleus engagés dans la solidarité, c’est une façon de construire la paix. Nous avons prévenu nos anciens camarades russes. C’est une mission pour penser l’avenir », affirme le président de l’association lyonnaise.

Depuis Vannes, coordonner les solutions d’hébergement partout en France

Dimanche 27 février, trois jours après l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe, Sébastien Champalaune a eu « un déclic ». Ce soir-là, alors qu’il est installé dans son salon à Vannes, le téléviseur affiche les images des premiers jours de l’invasion russe en Ukraine. En France, des maires et des particuliers disent vouloir accueillir des réfugiés. « J’étais bouleversé. Je me sentais impuissant. Avec quatre enfants à la maison, je ne peux pas accueillir d’Ukrainiens », explique ce développeur Web. Par curiosité, le quadragénaire pianote sur Internet en quête d’une plate-forme centralisant les offres d’hébergement. Rien. Deux jours plus tard, Sébastien Champalaune créé le site Solidarite-accueil-refugies-ukrainiens.fr et relaie le lien sur les réseaux sociaux.

Depuis, quelque 4 000 « hébergeurs » sont inscrits sur cet espace. Plus de 2 000 annonces s’empilent les unes sous les autres : un canapé dans un appartement de Nantes pour quelques nuits, une maison libre pour plusieurs mois dans l’Eure, une chambre dans un moulin breton, des places dans un chenil pour des animaux… « Nous réagissons dans l’urgence, insiste Sébastien Champalaune. Je ne bride pas les offres, mais je traque les dérives. » Plusieurs annonces de personnes confondant le site d’entraide avec un espace de rencontres ont été supprimées. La plate-forme a été attaquée par des hackeurs français. Cet indépendant a mis son activité professionnelle entre parenthèses pour la défendre et l’animer.

Sa dernière mise à jour ? Un espace réservé aux associations. Sébastien Champalaune avoue son incapacité à assurer le suivi des usagers de l’outil mais assure que des dizaines d’Ukrainiens, d’associations et de collectivités y ont trouvé des hébergements. « Tant qu’il y aura besoin, je serai là. Ma fatigue à côté de ce que vivent ces gens n’est rien », clame le Vannetais.

A Marseille, un ferry reconverti en centre d’accueil

Derrière les hautes grilles du grand port maritime de Marseille, des drapeaux ukrainiens flottent au vent. Seuls signes apparents de la transformation, depuis mardi 29 mars, du ferry Méditerranée, solidement amarré au môle J1, en centre d’accueil des réfugiés. Deux cent vingt-trois d’entre eux, essentiellement des femmes et des enfants, ont déjà pris possession d’une partie du demi-millier de cabines que compte ce bateau vieux d’une trentaine d’années, habituellement dévolu aux trajets vers l’Algérie. A l’intérieur, des espaces communs ont été spécialement aménagés : une crèche, un restaurant qui sert deux repas chauds par jour plus le petit-déjeuner, mais aussi un pôle santé, un guichet Pôle emploi, une annexe bancaire et même un cinéma.

Après une ouverture très médiatique, où représentants de l’Etat et élus locaux se sont félicités de leur initiative conjointe, le bateau est placé en quarantaine de tout journaliste. « Pour laisser le temps aux réfugiés de se poser », explique la préfecture des Bouches-du-Rhône. Plan Vigipirate oblige, l’accès au quai, en plein cœur de Marseille, est gardé. A l’entrée, chaque réfugié présente son badge nominatif aux couleurs de la Corsica Linea, la compagnie propriétaire du ferry. Les proches, eux, ne peuvent monter sur le bateau.

Devant les grilles du port, un jeune homme, qui refuse de révéler son identité, patiente. Ukrainien installé à Marseille depuis dix-sept ans, il vient dans l’espoir de voir son père et sa mère, originaires de Kharkiv, qui, la veille, ont été accueillis sur le navire. II s’inquiète qu’on leur ait attribué une cabine avec lits superposés. « Mon père a 67 ans et ma mère, 65 », explique-t-il en guettant leur sortie.

En affrétant le navire, l’Etat a souhaité centraliser le dispositif d’accueil des Ukrainiens dans la métropole marseillaise. Et a permis de soulager les hôtels, dans lesquels de nombreuses familles – près de deux mille réfugiés ont rejoint le département – étaient hébergées. Les deux collèges voisins ont été alertés de la possibilité de voir prochainement des élèves logés sur le ferry arriver dans leurs établissements.

« C’est assez extraordinaire de voir réunies autant de compétences différentes dans un parcours unique et coordonné », glisse Céline Nguyen-Lamouri, infirmière référente de la cellule d’urgence médico-psychologique qui intervient sur le Méditerranée. Vladyslav Atavin, traducteur, souligne, lui aussi, la qualité de l’accueil et la reconnaissance des réfugiés qu’il a croisés à bord. Seul bémol, l’étroitesse de certaines cabines, sans fenêtre, qui rappellent parfois les angoissants abris anti-bombardements. « Les réfugiés vivent encore dans la temporalité de la guerre. Pour eux, l’essentiel est d’être en lien avec leur famille, leur pays. Ils ne sont pas encore conscients d’être sur ce territoire, en sécurité », témoigne encore Céline Nguyen-Lamouri.

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Eric Schnaebele, ancien casque bleu de l’Association internationale des soldats de la paix, prépare son véhicule avant de partir en convoi humanitaire jusqu'à Jytomyr, en Ukraine. A Vaulx-en-Velin, le 30 mars 2022.

A Bordeaux, une permanence juridique pour les Ukrainiens

A Bordeaux, le barreau a ouvert une permanence, les mardis et jeudis de 10 heures à midi, pour répondre aux interrogations d’ordre juridique des réfugiés ukrainiens qui se présentent. Une cinquantaine d’avocats et des interprètes se sont portés volontaires et ont été formés pour répondre aux demandes, qui affluent. Une quinzaine de ressortissants ont déjà été accompagnés.

A l’initiative du projet, Me Delphine Meaude, présidente de l’Institut de défense des étrangers, rattaché à l’ordre des avocats. Il y a quinze jours, lorsque les demandes commençaient à se multiplier, l’avocate bordelaise a souhaité mettre en place des permanences réservées aux Ukrainiens.

« Lorsqu’ils arrivent, ils ne savent pas ce qu’ils peuvent faire. Ils ont entendu parler de la protection temporaire mais ne savent pas exactement en quoi cela consiste », explique-t-elle. Ce jeudi 31 mars, une jeune femme de 27 ans, qui souhaite garder l’anonymat pour des raisons de sécurité, est venue pour la seconde fois. Elle a besoin d’aide sur les démarches à effectuer pour sa demande d’asile. Elle s’inquiète aussi de devoir quitter dans trois jours son logement temporaire, qui doit être vendu. En 2014, elle avait fui le Donbass pour la France, avant de retourner en Ukraine terminer ses études d’économie internationale, à Kiev. Elle a fui la capitale ukrainienne il y a quelques semaines pour revenir à nouveau en France.

Une femme d’une cinquantaine d’années est elle aussi venue demander conseil. Elle a peur de perdre la protection temporaire si elle devait retourner à Kiev, même pour quelques jours. A ses côtés, son avocate, Me Elisabeth Fieschi-Bazin, déplore les problématiques administratives auxquelles doivent faire face les réfugiés ukrainiens. « Pour pouvoir travailler il faut une adresse, mais pour pouvoir trouver un logement, il faut travailler… Les procédures sont compliquées et ils ont besoin d’aide pour y arriver. »

A Villefranche-de-Rouergue, une médecine au service des réfugiés

« Les Ukrainiens, qui doivent quitter leur pays sous les bombes, ne peuvent pas patienter cinq heures aux urgences pour se faire soigner. La moindre des choses est de leur offrir une aide médicale digne de ce nom », martèle Pascale Combe Cayla, pneumologue au centre hospitalier La Chartreuse de Villefranche-de-Rouergue, commune aveyronnaise de plus de 11 500 habitants. En une semaine à peine, cette médecin a convaincu cinq autres confrères pour constituer une permanence médicale, qui doit être mise en service mardi 5 avril au sein même de l’hôpital.

Outre un gériatre, un médecin généraliste, deux anesthésistes et un urologue, une pédiatre bulgare, Penka Yorgova, s’est portée volontaire. « Même si je ne parle pas l’ukrainien, je le comprends car nos langues ne sont pas éloignées, indique Penka Yorgova, qui parle couramment russe. Trouver un traducteur sur place n’est pas évident alors que moi je suis en ville », reconnaît cette médecin, déjà mise à contribution pour traduire en français des réfugiés tchétchènes et géorgiens par le passé. Chaque mardi, elle libérera un créneau de deux heures pour les enfants ukrainiens.

« Ces personnes déplacées n’ont pas besoin de Carte vitale pour accéder aux soins », fait savoir Florence Serrano, élue municipale (divers gauche) et adjointe aux affaires sociales.

Depuis le début de la guerre, sept familles ukrainiennes sont arrivées sur le territoire de l’intercommunalité Ouest Aveyron. « Nous en attendons d’autres mais je m’oppose à l’accueil en masse pour pouvoir traiter ces réfugiés au cas par cas », prévient l’élue.

A Bourges, associations recherchent travailleurs

A travers le pays, des collectivités, petites ou grandes, et des associations dont l’asile n’était pas le cœur d’activité partent en quête de « chargés de mission accueil réfugiés ukrainiens » et de « coordinateurs hébergement réfugiés ukrainiens ». Une pléthore d’offres de CDD ou de missions d’intérim de trois à six mois fleurit sur Internet, rémunérés autour de 1 900 euros brut par mois.

A Bourges, c’est l’association emblématique Le Relais, spécialisée dans l’accompagnement de personnes en grande précarité sociale, qui a recruté, afin de servir de maillon entre les Ukrainiens et les communes du Cher ayant la capacité de les accueillir. « Bourges a déjà connu deux vagues de réfugiés, 200 personnes au total, principalement des femmes avec enfants. A chaque fois, la préfecture les met à l’hôtel Ibis Budget quelques jours, le temps des premières démarches administratives, et c’est à nous de les dispatcher ensuite, vers les communes et leurs structures ou familles d’accueil. On ne fait que de l’acheminement, mais c’est beaucoup de boulot », explique une cadre du pôle hébergement de l’association. « Il a donc fallu recruter deux intérimaires, déplacer un salarié d’un autre dispositif et maintenant on recherche une secrétaire pour absorber l’afflux d’appels, et aussi un autre travailleur social. L’idée, c’est vraiment d’éviter la cohue entre toutes les bonnes volontés. »

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Des professeurs de russe à la retraite enseignent le français à un groupe d'enfants ukrainiens ayant fui leur pays en raison de la guerre, à l’Institut Emmanuel-d’Alzon, à Nîmes, le 1er avril 2022.

L’université de Strasbourg offre un refuge aux scientifiques exilés

A Strasbourg, les milieux universitaires se mobilisent pour accueillir chercheurs et étudiants ukrainiens. L’université compte une importante communauté de scientifiques ukrainiens, avec lesquels elle entretient des relations de coopération, en particulier dans les domaines de la chimie et de la pharmacie. Dix chercheurs ont été accueillis au mois de mars (cinq réfugiés ukrainiens et cinq opposants russes) grâce à un fonds spécial du Programme national d’accueil en urgence de scientifiques en exil. Leur prise en charge est financée par l’Etat, pour une durée de trois mois. Neuf autres personnes ont candidaté dans le cadre du dispositif classique, courant sur un an et financé à 40 % par l’université. « Ce sont des scientifiques qui entretenaient déjà des liens avec leurs homologues strasbourgeois. Chacun a reçu le soutien du directeur du laboratoire concerné et pourra donc s’intégrer facilement », note le vice-président de l’université de Strasbourg, Mathieu Schneider.

D’autres réfugiés ukrainiens sont attendus dans les mois à venir, si bien que l’université de Strasbourg craint aujourd’hui de ne pouvoir financer l’accueil de chercheurs en exil d’autres nationalités, syriens et turcs notamment. « Ils ne doivent pas être oubliés », estime Mathieu Schneider.

Le même problème se pose dans l’accueil des étudiants étrangers, a qui est proposé une formation passerelle permettant d’intégrer un cursus universitaire classique. A la soixantaine d’élèves aujourd’hui pris en charge sont venues s’ajouter plus de soixante demandes de réfugiés en provenance d’Ukraine. « On a mis en place un programme court, dans l’urgence. Mais on sait que les demandes vont encore affluer », indique Mathieu Schneider. Ce dernier souligne deux grandes failles dans le dispositif actuel d’asile temporaire : il ne concerne pas les étudiants ukrainiens présents en France avant la guerre, et qui se retrouvent aujourd’hui sans ressources, ni les étudiants d’autres nationalités dont le cursus a été interrompu par le conflit.

Un « asile sportif » dans les Hauts-de-France

Dans les Hauts-de-France, le conseil régional offre « un asile sportif » depuis la mi-mars à une trentaine de champions ukrainiens. « Ça me tenait à cœur de leur permettre de continuer leur préparation sportive pour qu’ils puissent défendre les couleurs de leur pays », explique Florence Bariseau, la vice-présidente en charge des sports au conseil régional.

Sergueï Bubka, légende du saut à la perche et président du comité national olympique ukrainien, a permis de faire le lien entre les deux pays. C’est en 1993, lors du meeting d’athlétisme de Liévin (Pas-de-Calais), que « le tsar » Bubka a battu le record du monde de saut à la perche. Presque trois décennies plus tard, c’est avec une certaine émotion qu’une quinzaine de jeunes perchistes ukrainiens ont découvert l’empreinte de la main de cette légende exposée au stade nordiste.

Ces athlètes, essentiellement des jeunes femmes ou des mineurs, ont trouvé le gîte, le couvert et des structures adaptées à leurs entraînements dans cet équipement sportif régional. « Quatorze autres arrivent ce week-end à Liévin, précise Florence Bariseau, en plus des cinq places à Wattignies. »

Le Centre de ressources, d’expertise et de performance sportive de Wattignies (Nord) est devenu le refuge de sportives de talent comme l’Ukrainienne Alina Shukh, championne du monde junior de javelot et championne d’Europe en heptathlon. Avec sa mère, qui est aussi son coach, l’athlète de 23 ans a rejoint le nord de la France le 18 mars, dix jours à peine après le début de la bataille de Brovary, sa ville natale, située à l’est de Kiev. Depuis, elle semble avoir ajouté une nouvelle discipline dans son parcours : s’emparer d’un micro pour faire entendre la voix de l’Ukraine. « Je veux témoigner pour que les gens comprennent ce qui se passe, dit-elle, touchée par l’accueil qui lui a été réservé. C’est ma manière d’être utile à mon peuple. »

A Nîmes, des cours de français pour les enfants réfugiés

Ivana, 12 ans, ferme les yeux en prononçant les paroles de sa chanson fétiche. Avec Katia, Prokhor et Sioma, la fillette retrouve Elisabeth Ruellan et Sylvie Bouzanquet tous les après-midi. Professeures de russe à la retraite, ces deux Nîmoises s’investissent depuis trois semaines dans les classes de l’école privée D’Alzon pour enseigner le français.

Actuellement, quatorze jeunes ayant fui leur pays en guerre y sont scolarisés. « Ils ne se connaissaient pas entre eux, ils ne connaissent pas notre alphabet, ils arrivent dans un contexte difficile, mais ils ont une envie d’apprendre remarquable », observe Elisabeth Ruellan. « Russophone, je savais que je pouvais être utile », confie Sylvie Bouzanquet, qui a embarqué avec elle son compagnon, Jean-Luc Defrennes, qui se débrouille assez en russe pour échanger avec les enfants, et une amie, Chantal Dumontel, qui l’avoue : « Le premier jour, j’étais scotchée d’émotion. »

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Katia fait partie des quatorze enfants ukrainiens qui fréquentent l'Institut Emmanuel-d'Alzon, et suivent des cours de français, à Nîmes, le 1er avril 2022.

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Sioma, à l'Institut Emmanuel-d'Alzon où il apprend le français auprès de professeurs bénévoles, à Nîmes, le 1er avril 2022.

Chiffres, vocabulaire basique, couleurs… Les professeures transmettent les premières notions de français indispensables. « Ce n’est pas simple pour les plus jeunes de rester concentrés. En Ukraine, l’école ne commence qu’à 7 ans », explique Irina Parfenyuk, enseignante de russe de l’école. Ce vendredi, elle s’enthousiasme d’entendre Sioma prononcer seul : « J’aime lire ! »

Institution de l’enseignement catholique à Nîmes, avec plus de 6 000 enfants inscrits, D’Alzon a fait fonctionner son réseau pour aider les réfugiés. « Même sans parler leur langue, on essaie d’apporter une solution à tous les problèmes. L’autre jour, l’une des petites avait un mal de dents… », confie Carole Azalbert, le « couteau suisse » de l’établissement. Certains volontaires ont organisé une journée à la mer à La Grande-Motte (Hérault). Parmi les dernières initiatives, l’idée de deux collégiennes de créer un compte Vinted pour vendre des vêtements d’occasion. Avec cet argent, elles achètent des paniers de légumes pour les distribuer aux nouveaux venus.

 


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