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La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : Médiapart - Nejma Brahim et Floriane Alaoui - 10/05/2022

Plus de 30 000 personnes auraient trouvé refuge en France depuis le début de la guerre d’invasion russe en Ukraine, en février. Si le gouvernement a assuré que tous les moyens seraient mis en œuvre pour les accueillir, la désorganisation persiste, regrettent les acteurs de terrain.

Tout a débuté dans les gares parisiennes en mars 2021, lorsque des réfugiées ukrainiennes, souvent accompagnées de leurs enfants et bébés, ont débarqué en masse de trains en provenance d’Allemagne. La Croix-Rouge a vite été missionnée pour investir les lieux et créer des espaces d’accueil dans d’anciens espaces lounge ou bars-restaurants, comme gare de l’Est ou gare Montparnasse, et installer des signalétiques en ukrainien dans tous les halls pour aider les réfugié·es à s’orienter.

En apparence, tout semblait parfait ou presque. Dans les faits, une certaine désorganisation se faisait déjà sentir. Selon plusieurs sources, les gares parisiennes ont aussi été investies par des réseaux mafieux désireux de mettre la main sur ces femmes venues d’un pays meurtri, un simple sac sur le dos. Les membres de ces réseaux les attendaient parfois sur le quai, dès leur descente de train.

« On a eu de gros soucis avec ça », confirme un agent de sécurité d’une gare parisienne, qui préfère garder l’anonymat. « C’était souvent des hommes, en groupe, qui venaient attendre à l’intérieur de la gare. La SNCF a dû mettre le holà. Maintenant, quand ils nous voient, ils essaient de se cacher ou attendent à l’extérieur. » « Effectivement, un collègue à nous en parlait encore ce matin. Ça s’est quand même calmé depuis quelques jours, complète un agent de la SNCF rencontré mi-mars. Que des personnes puissent profiter de la détresse des réfugiées, c’est très grave. »

La Croix-Rouge a vite investi les différentes gares parisiennes pour accueillir et orienter les réfugiés ukrainiens. © Nejma Brahim / Mediapart

La Croix-Rouge a vite investi les différentes gares parisiennes pour accueillir et orienter les réfugiés ukrainiens. © Nejma Brahim / Mediapart

En Allemagne, le problème a été pris très au sérieux et les services de police ont vite communiqué sur les risques encourus par les réfugié·es. Europol alertait, dans un communiqué publié en mars : « Le nombre de victimes potentielles arrivant d’Ukraine est susceptible d’attirer à la fois des agresseurs individuels et opportunistes se faisant passer pour des volontaires ainsi que des réseaux criminels spécialisés dans la traite des êtres humains. Toutes les autorités concernées doivent rester vigilantes afin d’identifier rapidement les tentatives criminelles d’exploiter la crise et la situation vulnérable des personnes arrivant d’Ukraine. »

« Nous savons que les risques de violences sexistes, de traite, d’abus, de traumatisme psychologique et de séparation familiale augmentent en période de conflit et de déplacement, mais étant donné le profil sexo-spécifique de cet exode et le fait que de nombreux enfants ont fui seuls, ces risques sont multipliés », indiquait de son côté le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) mi-avril, ajoutant que les autorités nationales devaient « faire davantage pour s’attaquer à ce problème et atténuer les risques ».

Sollicités, ni le Service d’information et de communication de la police nationale (Sicop), ni la préfecture de police de Paris n’ont souhaité répondre à nos questions concernant les moyens mis en place pour lutter contre les réseaux criminels qui chercheraient à profiter de la vulnérabilité des réfugiées ukrainiennes en France.

L’État n’est pas très proactif sur la santé des réfugiées.
À la ville de Paris

À Toulouse, une traductrice bénévole a en mémoire le cas d’un homme venu d’Ukraine, en visite au centre de la Croix-Rouge, « totalement paniqué ». « Il hurlait qu’il avait besoin d’une solution d’hébergement en urgence et qu’il ne pouvait pas retourner là où il était logé jusqu’ici. Il avait fui la veille un appartement occupé par plusieurs personnes et avait dormi dehors sur un banc. Il assurait aux équipes de la Croix-Rouge qu’on lui avait demandé un rein contre son hébergement sur place. »

« Je me souviens d’une femme qui est venue nous voir au point d’accueil de la gare pour nous expliquer qu’elle était jusqu’ici logée dans des conditions obscures, dans un garage situé à une porte de Paris », ajoute en off une bénévole de la Croix-Rouge.

C’est aussi dans les gares parisiennes que les traducteurs bénévoles se sont organisés, en soutien aux équipes de la Croix-Rouge, pour conseiller, orienter ou parfois simplement écouter les femmes et leurs enfants. Une boucle WhatsApp réunissant près de 300 traducteurs a été créée et a permis un roulement quotidien dans les différentes gares de la capitale.

Des réfugiées ukrainiennes arrivant en gare de Paris-Est, le 11 mars 2022. © Laure Boyer / Hans Lucas via AFP

L’ouverture d’un premier centre d’accueil dans le XVIIIe arrondissement, en urgence, a permis de désengorger les gares et d’éviter qu’elles ne prennent l’allure de campements fermés.

Mi-mars, le centre a déménagé dans le XVe arrondissement de Paris, Porte de Versailles, pour être géré par l’association France Terre d’asile. « Les conditions d’accueil se sont un peu améliorées grâce à cela, note une source à la ville de Paris. Mais l’État n’est pas très proactif sur la santé des réfugiées, qui ont pourtant fui une zone de guerre. Entre-temps, un point d’accueil pour la Sécurité sociale a été ouvert au centre, mais tant que les personnes n’ont pas la protection temporaire, leurs droits à la Sécurité sociale ne s’ouvrent pas. »

Et d’ajouter que l’urgence, pour l’État, reste de « dispatcher » les réfugié·es en province, plutôt que de « privilégier la qualité de l’accueil et le panier de soins », alors que certaines personnes souffrant de pathologies chroniques comme le diabète, l’insuffisance rénale, le VIH ou le cancer se retrouvent en rupture de traitement. « On sent que la préoccupation du ministère de l’intérieur et des préfectures est d’éviter une situation d’embolie en Île-de-France. Toute leur énergie est tournée vers la rationalisation des flux. »

Dans le même temps, l’État a pratiqué une politique de différenciation assumée entre exilé·es ukrainien·nes et non ukrainien·nes. Comme a pu le documenter Mediapart en région parisienne, de jeunes migrants ont été menacés d’expulsion d’un centre d’accueil avant l’arrivée de réfugiées ukrainiennes. D’autres exilés ont été laissés à la rue, dans des campements au nord de Paris, et ont manifesté ou ont occupé un bâtiment vide du IXe arrondissement de Paris pour réclamer l’égalité des droits.

Les travailleurs sociaux et agents de l’Ofii désemparés

À Calais, où près de 2 000 exilé·es de différentes nationalités subissent le harcèlement des forces de police et voient leur campement évacué toutes les 48 heures, un centre a été ouvert pour accueillir les Ukrainien·nes et des informations leur ont été fournies pour se rendre légalement au Royaume-Uni. À plusieurs reprises, des bénévoles associatifs affirment avoir téléphoné au 115, d’abord pour des personnes exilées non ukrainiennes, puis pour des Ukrainiennes. Pour les premières, aucune place n’était disponible, alors que des places en hôtel étaient attribuées sans difficulté aux secondes.

« Que l’on accueille les Ukrainiens de manière digne est très bien, mais pourquoi ne réserver cela qu’à eux ? Cela prouve que tout ce que l’on demande depuis des années est possible et qu’il y a donc une volonté de mal accueillir les autres. Les autorités assument ce traitement discriminatoire et raciste », dénonce Marguerite, coordinatrice de l’association Utopia 56 à Calais. À Perpignan, un « deux poids, deux mesures » a également été assumé par le maire RN, Louis Aliot, tout comme à Nice, où Christian Estrosi a accueilli plusieurs milliers d’Ukrainien·nes, alors qu’il refusait d’accueillir des Afghan·es mi-août 2021.

Depuis mars, l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) se plie en quatre pour assurer aux Ukrainien·nes ayant rejoint la France la meilleure prise en charge, à l’heure où l’UE a décidé de leur accorder une protection temporaire. Quitte à délaisser certaines de ses missions, comme le montre un mail consulté par Mediapart.

Il conviendra si nécessaire de dégrader temporairement les autres activités pour faire face à la demande.
Antoine Troussard, directeur adjoint de l’Office français de l’immigration et de l’intégration

Le 12 mars, Antoine Troussard, directeur général adjoint de l’Ofii, demande à ses 28 directrices et directeurs régionaux de métropole de « continuer à procéder à la délivrance des cartes ADA [allocation pour demandeurs d’asile – ndlr] pour les Ukrainiens munis d’une autorisation provisoire de séjour ».

Et ajoute : « Je précise que cette mission est prioritaire et qu’il conviendra si nécessaire de dégrader temporairement les autres activités pour faire face à la demande. »

« Depuis plusieurs semaines, on a mis de côté un certain nombre de nos missions pour pouvoir nous rendre sur le terrain et délivrer les cartes ADA », confirme un agent de l’Ofii. Contacté, Didier Leschi, son directeur général, assure que « ce type de “dégradation” des missions pour accorder la priorité aux demandeurs d’asile n’est pas nouveau », en référence à l’arrivée en France, l’été dernier, de quelques milliers d’Afghan·es fuyant le retour des talibans.

« C’est faux, rétorque l’agent cité plus haut. On n’a jamais reçu ce type de mail pour nous demander de les prioriser, et, surtout, la vague d’arrivée était bien moins importante. Seules les équipes proches de l’aéroport de Roissy étaient vraiment concernées. »

Des guichets « forains »

Pour répondre à l’afflux de réfugié·es ukrainien·nes, l’Ofii a ainsi décidé de revoir son organisation. Ses agents ne se contentent plus de se rendre en préfecture, où sont installés les guichets uniques pour les demandeuses et demandeurs d’asile (Guda). Ils sont aussi amenés « à parcourir des kilomètres pour être présents dans chaque lieu d’accueil, en préfecture et centre d’accueil spécifique », comme l’explique l’Ofii sur son site. Pendant un mois et demi, ces guichets dits « forains » ont représenté les « deux tiers » du travail de l’agent déjà cité.

« On ne pénalise pas les demandeurs d’asile lambda car le guichet unique est toujours ouvert. Mais on a dû laisser de côté nos missions de “back office” comme les décisions de sortie d’hébergement pour les déboutés de l’asile ou les prolongations de maintien quand ils l’obtiennent », ajoute celui qui réussit seulement aujourd’hui à se pencher sur son travail laissé de côté depuis un mois et demi.

Le fait que l’office choisisse sciemment de « dégrader et de mettre de côté tout le reste n’est pas normal », complète un autre agent de l’Ofii. « En même temps, c’est leur façon de fonctionner. Ils vont à l’urgence. Les agents des services asile sont perturbés et se retrouvent à ne faire que de l’Ukraine du jour au lendemain. »

L’arrivée massive des Ukrainiens a bouleversé notre quotidien.
Une travailleuse sociale à Paris

Dans sa région, des réfugié·es ukrainien·nes devraient bientôt avoir accès à quelques centaines d’heures de cours de français, dans un dispositif qui ne leur est pas dédié. « L’inquiétude qu’on a, c’est que ça empiète sur les heures destinées aux autres nationalités, pour qui les cours sont obligatoires dans le cadre du contrat d’intégration. »

Sur le terrain, certains acteurs se plaignent aussi d’avoir été contraints de délaisser leur public habituel au profit des réfugié·es ukrainien·nes. « L’arrivée massive des Ukrainiens a bouleversé notre quotidien », confie une travailleuse sociale d’un centre d’hébergement d’urgence à Paris.

« Des dispositifs de mise à l’abri ont été ouverts pour eux et on nous a demandé de les rejoindre, donc d’arrêter de nous occuper des autres exilés. Beaucoup de collègues, moi y compris, ont refusé, estimant que ce n’était pas la bonne logique. Que vont devenir les personnes que l’on accompagne sans suivi ? », interroge-t-elle, avouant ne pas comprendre pourquoi il a été décidé de piocher dans des équipes déjà en sous-effectif plutôt que d’embaucher.

Certaines familles ont aussi vu leurs rations alimentaires diminuer ou leur créneau dans les laveries solidaires limité du jour au lendemain. « Celles que je suis n’ont plus qu’un colis alimentaire par mois, contre un colis par semaine auparavant. Cela met beaucoup d’adultes en difficulté, qui préfèrent ne pas manger pour nourrir leurs enfants », explique la travailleuse sociale.

Les dons issus des surplus de la cantine scolaire ou de la période du ramadan ont parfois permis de pallier les manques de l’État. D’autres familles ont perdu leur place d’hébergement en hôtel et ont été relogées en dehors de Paris.

« Il n’y a aucune prise en compte de la situation personnelle des enfants ou des parents », regrette une directrice d’un établissement scolaire à Paris, qui rapporte le cas d’un élève catapulté du jour au lendemain dans l’Essonne après que les parents ont dû quitter l’hôtel où ils étaient hébergés.

« L’enfant souffre d’une maladie génétique grave. La famille était baladée d’hôtel en hôtel à Paris mais disons qu’avec les taxis adaptés, ça fonctionnait… Aujourd’hui, il est en rupture scolaire », résume-t-elle. Ce qui la frappe : le discours des travailleuses et travailleurs sociaux, qui laisse entendre que les hôtels sont vidés pour accueillir les Ukrainien·nes.

Dans le même esprit, un courrier de la ville de Paris et de l’Académie de Paris, que Mediapart a pu consulter, annonce aux directrices et directeurs d’écoles et aux responsables éducatifs la gratuité de la restauration scolaire et des activités péri et extrascolaires pour les enfants ukrainiens jusqu’à fin août 2022. « Je n’ai jamais reçu de tel courrier concernant d’autres types d’accueil. J’ai même dû parfois “omettre” de déclarer des enfants dans des situations dramatiques déjeunant à la cantine », commente la directrice.

Collectivités territoriales et associations livrées à elles-mêmes

« Dès leur arrivée en France, les réfugiés ukrainiens sont pris en charge à l’hôtel ou dans des structures d’accueil », complète un autre travailleur social. « Sauf qu’au préalable, on a mis fin à la prise en charge des familles qui y étaient déjà et qui se retrouvent donc sans solution. En ce moment, nous prenons en charge des personnes qui n’ont rien de précaire, si ce n’est la situation dans leur pays : nombre d’Ukrainiens ont encore des ressources et, pour certains, continuent à percevoir leur salaire », assure-t-il, ajoutant qu’il est malgré tout « désolant de devoir prioriser la précarité ».

C’est sans doute pour éviter que l’Île-de-France ne soit saturée que l’État a demandé aux préfets de « structurer les initiatives » de nombreux acteurs tels que les « collectivités, bailleurs, opérateurs institutionnels mais aussi particuliers »« Vous recenserez en vous appuyant sur vos réseaux locaux et sur l’exploitation de la plateforme parrainage.refugies.info les logements mis à disposition par l’ensemble de vos partenaires habituels et les logements et propositions d’hébergement venant de particuliers », peut-on lire dans une instruction datée du 22 mars.

Dispositifs saturés

Problème, « aux motifs de la solidarité et du partage des responsabilités en pareille situation, l’État dresse une série d’orientations dont il fait reposer la mise en œuvre et les moyens sur les acteurs dans les territoires : collectivités, bailleurs sociaux et associations », estime la Fédération des associations et des acteurs pour la promotion et l’insertion par le logement (Fapil), à l’origine d’une note décryptant les modalités fixées par le gouvernement. Pour elle, « le flou inhérent à l’inédit de la situation et à l’incertitude quant à son évolution ne peut justifier des mesures au mieux peu “réalistes”, au pire entraînant nos associations vers des difficultés de mise en œuvre impossibles à surmonter ».

Le maire d’une commune périurbaine française développe : « Quand la guerre a débuté, on nous demandait tous les deux jours si on pouvait accueillir des Ukrainiens dans les structures associatives de la ville. Sauf que les dispositifs financés par l’État sont déjà saturés en temps normal », rappelle-t-il, ajoutant qu’il a fallu « plus d’un mois au gouvernement » pour donner des directives en la matière.

« De même, si une collectivité doit louer un immeuble auprès d’un bailleur, quels moyens met-on en face ?, interroge l’élu. Partout, la gratuité du logement est évoquée et encouragée, mais il y a une volonté de l’État de faire peser le coût sur les communes et départements. »

Une jeune Ukrainienne installée à Paris attend l’arrivée d’une famille de réfugiés gare de l’Est, vendredi 18 mars 2022. © Nejma Brahim / Mediapart

Dans sa localité, où une dizaine d’Ukrainien·nes a trouvé refuge, « l’ensemble des frais liés à leur installation » est pris en charge par la ville. « Si l’on réquisitionne des logements vacants, comme un logement de fonction par exemple, il faut payer les charges, le mobilier, l’aide alimentaire, l’accompagnement social… Et l’ADA, qui commence à être versée, leur permet tout juste de se nourrir. » À titre d’exemple, appuie-t-il, équiper un F3 coûte en moyenne 3 500 euros, un F4 4 500 euros. L’autre dispositif que veut encourager l’État est l’intermédiation locative (IML). Là encore, les collectivités se heurtent à une difficulté majeure.

« L’IML consiste pour une association à louer un hébergement pour une personne en difficulté ou en demande d’asile. Elle touche un forfait de l’État pour assurer son accompagnement social. Après trois mois, lorsque la personne est stabilisée, le contrat de location glisse vers le locataire. L’État se désengage donc et fait peser le risque sur le propriétaire », déroule le maire. Concernant les Ukrainien·nes, une dotation de 1 200 euros est prévue pour l’IML. « Sauf que les Ukrainiens n’ont pas vocation à rester en France et à être locataires. La période de trois mois où les associations sont censées assumer le risque s’instaure donc sine die. »
L’État a décidé de faire du low cost sur les Ukrainiens.
Le maire d’une commune périurbaine

Selon le maire, beaucoup d’associations ont déjà refusé d’appliquer l’IML pour les Ukrainien·nes, considérant le dispositif « non adapté ». D’autres structures, comme les centres provisoires d’hébergement (CPH) ou les centres d’accueil et d’examen des situations administratives (Caes), coûteraient bien plus cher à l’État. « Ce serait plus adapté à ce public, mais l’État a décidé de faire du low cost sur les Ukrainiens. »

L’hébergement citoyen, enfin, montre d’ores et déjà ses limites. Tous les jours, le maire affirme recevoir des appels d’hébergeurs citoyens demandant à reloger les réfugié·es qu’ils hébergent. « On n’a pas de solution immédiate. Ça râle de partout, les gens n’imaginaient pas que cela durerait autant. »

« Lors du début de la crise en Ukraine, je venais de terminer un petit appartement jouxtant ma maison, témoigne un hébergeur solidaire. Je l’ai proposé à la préfecture en expliquant bien que je ne pouvais pas m’occuper de réfugiés mais que j’étais prêt à mettre gracieusement cet appartement à disposition. Or je m’aperçois aujourd’hui que je suis obligé de m’occuper du couple accueilli, largement démuni. » Il lance lui-même, à titre d’exemple, des démarches auprès de la Croix-Rouge de sa commune ou des Restos du cœur. « Tout ne repose que sur du bénévolat, l’État étant complètement absent du processus. »

Le risque de la durée

Et d’ajouter : « Une autre famille m’a dit que l’hébergement d’une famille ukrainienne lui revenait à 250 euros par mois et qu’elle était obligée de faire toute la paperasse. Nous sommes bien loin de la communication gouvernementale : tout repose sur la générosité de particuliers et en rien sur l’État. »

Près de Montpellier (Hérault), 200 Ukrainien·nes ont pu s’installer dans un village vacances du Cap d’Agde mi-mars. Mais, selon nos informations, les enfants n’étaient toujours pas inscrits à l’école fin mars, ni les adultes à Pôle emploi. « Et comment on va faire quand le propriétaire va vouloir reprendre possession des lieux pour faire sa saison ? », interroge une source locale.

L’un des agents de l’Ofii déjà cité ironise : « On est en mai et les cours de français n’ont toujours pas commencé pour certains. Si ça se trouve, ils seront déjà tous repartis quand ce sera effectif. » L’éclatement de l’accueil vient encore compliquer la donne sur le plan organisationnel. « Entre l’hébergement citoyen, les hôtels et les associations, il faut arriver à les retrouver, les réfugiés ! Tout a été fait à la va-vite, en présumant que ce serait temporaire. Mais si le conflit s’installe dans la durée, on va s’enfoncer dans une galère sans nom. »

« Je n’ai jamais vu un accueil aussi décousu. L’État croise les doigts pour que ça tienne le plus longtemps possible dans les familles d’accueil et retarde au maximum le moment où il devra réellement prendre en charge ces réfugiés, en comptant sur le fait qu’ils repartiront vite dans leur pays. Il y a une ambiguïté désagréable entre le discours politique et le sentiment des acteurs locaux », conclut le maire déjà cité.

 


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