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Source : InfoMigrants - Maïa Courtois - 29/07/2022

La lutte contre les passeurs est régulièrement brandie comme une priorité dans les politiques migratoires des États européens. Mais quelles réalités recouvre le terme de "passeurs" ? Dans un rapport paru fin juillet, le réseau d'ONG PICUM (plateforme de coordination internationale pour les migrants sans-papiers) invite à "changer de paradigme". Et ce, pour sortir d'une stratégie "contre-productive", voire délétère pour les migrants. Marta Gionco, chargée de plaidoyer sur les politiques migratoires au sein de la PICUM, décrypte ces enjeux pour InfoMigrants.
InfoMigrants : Dans le rapport produit par le réseau PICUM, vous expliquez qu'il subsiste un "mythe" autour des passeurs. Ces derniers sont considérés uniquement comme des acteurs de réseaux criminels, alors qu'en réalité il existe plusieurs profils : il peut s'agir de migrants se trouvant eux-mêmes sur la route de l'exil, de personnes agissant pour leurs proches... Quelles sont les proportions de ces différents profils ?

Marta Gionco : Nous demandons depuis des années à la Commission européenne des informations sur les profils des personnes accusées d'être des passeurs. Mais nous avons très peu de données. Nous restons avec une définition très large, qui varie selon les pays européens.

En Belgique ou en Grèce, par exemple, des personnes ont été accusées de "self-smuggling" ("passeur pour soi-même") - ce qui signifie, en pratique, qu'elles sont entrées irrégulièrement car elles n'avaient pas d'autres moyens. C'est un nouveau concept, avec peu de base légale.

La définition du mot "passeur" s'étend tellement qu'elle englobe également des individus agissant pour leur famille. Aux Pays-Bas, trois frères ont été condamnés parce qu’ils avaient payé le voyage de leurs parents et leur sœur, après que des demandes précédentes de regroupement familial leur avaient été refusées. En Roumanie, huit mineurs non accompagnés ont été accusés de trafic de migrants juste parce qu'ils avaient passé la frontière irrégulièrement.

Nous n'avons pas de chiffres exhaustifs, mais nous savons que beaucoup de personnes accusées d'être des passeurs agissent, en fait, pour sauver leur vie ou celles de leurs proches.

IM : Pourquoi le "mythe" autour des passeurs est-il encore si tenace ?

MG : Très souvent, la législation sur les passeurs est utilisée par les États pour limiter davantage la migration, et pour justifier plus de surveillance.

Elle s'inscrit dans une politique globale de fermeture des frontières et d'augmentation des retours forcés, qui rend les traversées de plus en plus difficiles. La Commission européenne dispose d'un nouveau plan [Plan d'Action contre le trafic de migrants 2021-2025, ndlr] qui se focalise encore plus que le précédent sur la criminalisation. Souvent, ces politiques sont présentées comme permettant de sauver des vies. Or, elles causent plutôt des pertes.

IM : En Grèce ou encore en Italie, des personnes conduisant les embarcations sont jugées comme des passeurs et emprisonnées. En quoi est-ce inquiétant ?

MG : C'est un phénomène en forte expansion ces dernières années, même si cela existe depuis au moins une décennie. En criminalisant les personnes sur les bateaux, vous criminalisez celles qui se déplacent pour leur dignité, pour leur vie.

Il existe pourtant une décision de la plus haute Cour de justice italienne qui a défendu "l'état de nécessité" dans le cas de deux jeunes naufragés accusés d'aide au passage.

>> À (re)lire : La Grèce emprisonne des milliers de migrants "pour en dissuader d'autres de venir"

Tout cela devient préoccupant. L'information se répand. Les migrants savent que s'ils sont ceux qui tiennent la barre de l'embarcation, ou ceux qui appellent à l'aide, ils s'exposent à des condamnations. Ils risquent des années de prison, sans pouvoir retrouver leurs proches ni déposer l'asile. Bien sûr, ils ont peur.

La conséquence est que, parfois, on voit des personnes qui lâchent la barre du bateau lorsque les secours arrivent. Ou s'éloignent du moteur, pour ne pas être identifiées comme les passeurs. Ces mouvements créent encore plus de déséquilibre sur les canots et mettent la vie de tout le monde en danger.

IM : Vous décrivez aussi dans votre rapport une criminalisation grandissante de la solidarité. En France, nous avons eu un débat juridique qui s'est soldé par l'introduction du principe de fraternité dans la Constitution. N'existe-il pas ce type d'évolution ailleurs ?

MG : Il y a bien eu des évolutions : la relaxe de Cédric Herrou [célèbre agriculture accusé d'aide à l'immigration clandestine pour avoir aidé des migrants, ndlr], mais aussi des acquittements en Belgique. Quand les cours de justice sont indépendantes, elles peuvent jouer un rôle important.

Mais cela ne vaut pas pour tout le monde. En Belgique, pour des faits similaires, les personnes ayant la nationalité belge ont été acquittées tandis que des exilés qui ne l'avaient pas ont été condamnés. Les migrants sont touchés de manière disproportionnée par cette criminalisation.

>> À (re)lire : Grèce : 439 ans de prison pour trois survivants d'un naufrage accusés d'être des passeurs

Même s'il y a des formes de reconnaissance, la criminalisation de la solidarité continue donc de s'amplifier. En Europe, il existe encore de nombreuses poursuites judiciaires liées au délit de solidarité, avec au moins 89 personnes poursuivies dans l’Union européenne entre janvier 2021 et mars 2022.

Il faut changer la définition légale au niveau européen, en considérant qu'un passeur est uniquement celui qui touche un "profit financier abusif". Sans quoi, on peut criminaliser le conducteur de bus qui ne vérifie pas les documents des passagers et leur fait payer le ticket. Et n'importe quel citoyen se transforme en garde-frontières. Nous devons concentrer les efforts sur les personnes qui en exploitent réellement d'autres.

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