Source : InfoMigrants - la rédaction - 02/12/2022
Le Centre européen pour les droits constitutionnels et humains a annoncé, mercredi, avoir déposé une plainte pour crimes contre l'humanité contre des dirigeants européens devant la Cour pénale internationale. L'ONG les accuse d'avoir collaboré avec la Libye pour l'interception de migrants en mer malgré les risques de sévices que les exilés encourent dans le pays.
Le Centre européen pour les droits constitutionnels et humains (ECCHR) a déposé une plainte pour crimes contre l'humanité devant la Cour pénale internationale (CPI) visant plusieurs responsables européens, a annoncé, mercredi 30 novembre, cette ONG allemande, soutenue par l'ONG, Sea-Watch.
Parmi les personnes visées par la plainte figurent l'ancien ministre de l'Intérieur italien Matteo Salvini, les ancien et actuel Premiers ministres maltais Robert Abela et Joseph Muscat, ou encore l’ancienne cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini.
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L'ECCHR estime que la politique européenne de soutien aux garde-côtes libyens chargés d'intercepter les exilés en Méditerranée puis de les ramener en Libye a rendu ces personnalités indirectement responsables des violences et exactions subies par les migrants dans le pays. Les exilés, qui sont interceptés en mer par les garde-côtes libyens, sont systématiquement envoyés dans des centres de détention, où ils subissent des violences physiques et sexuelles, des privations de nourriture et de la torture.
"Bien qu'ils aient eu connaissance de ces crimes, des fonctionnaires des agences de l'UE ainsi que de l'Italie et de Malte ont renforcé leur collaboration avec la Libye pour empêcher les réfugiés et les migrants de fuir la Libye par la mer", souligne l'ECCHR dans son communiqué, publié mercredi 30 novembre. "Ce soutien et cette collaboration tendent à démontrer le rôle décisif que jouent les hauts fonctionnaires de l'UE dans la privation de liberté des migrants et des réfugiés fuyant la Libye", ajoute l'ONG.
Enquête sur les faits de collaboration
L'ECCHR et Sea-Watch appellent la CPI à enquêter sur ces faits de collaboration entre acteurs européens et libyens et à traduire en justice les responsables. Les deux ONG réclament également la fin du financement des programmes d’externalisation des frontières européennes qui s'appuient, entre autres, sur le soutien et la formation des garde-côtes libyens. Elles demandent enfin la création d'un programme civil de recherche et sauvetage européen qui serait financé par les États membres de l'Union européenne (UE).
Environ 100 000 migrants ont été interceptés au large des côtes libyennes et renvoyés dans le pays depuis 2017, date de la signature d'un accord entre la Libye et l'Italie pour lutter contre l'immigration illégale. Outre l'Italie, l'UE a versé depuis 2015 plus de 500 millions d'euros au gouvernement de Tripoli pour l'aider à freiner les départs de migrants vers l'Europe.
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Malgré les preuves de plus en plus nombreuses des cas de maltraitance envers des migrants en Libye, l'UE n'a pas cessé son aide financière au pays. Pire, l'Union a elle-même reconnu dans un rapport confidentiel remis en début d'année que les autorités libyennes ont eu recours à un "usage excessif de la force" envers les migrants et que certaines interceptions en Méditerranée ont été menées à l'encontre de la règlementation internationale.
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En 2021, Amnesty international a accusé l'UE de "complicité" dans les atrocités commises sur le sol libyen à l'encontre des exilés. L'ONG, comme le fait l'ONU, exhorte régulièrement les États membres à "suspendre leur coopération sur les migrations et les contrôles des frontières avec la Libye". En vain.
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