Source : InfoMigrants - la rédaction - 14/04/2023
Le ministre italien des Affaires étrangères a demandé jeudi au Fonds monétaire international (FMI) d’octroyer des financements à la Tunisie, sans attendre les réformes du gouvernement tunisien. Rome craint qu’un effondrement économique de ce pays du Maghreb ne contribue à une augmentation des départs vers l’Europe. Et ce, alors que les débarquements en Italie explosent par rapport à 2022.
Le gouvernement d’extrême droite de la Première ministre italienne Georgia Meloni met tout en œuvre pour éviter un afflux de migrants sur son sol. Le ministre des Affaires étrangères, Antonio Tajani, a tancé jeudi 13 avril le Fonds monétaire internationale (FMI) d’agir rapidement en Tunisie, sans poser de conditions.
Selon le responsable, les aides financières prévues par l’organisation ne doivent pas être "totalement conditionnées à la conclusion du processus des réformes".
"Notre proposition est de commencer à financer la Tunisie, à travers le FMI, et de verser une première tranche" sans attendre les réformes économiques jugées nécessaires au pays, en crise financière, a déclaré le ministre italien lors d’un point presse à l’issue d’une rencontre avec son homologue tunisien Nabil Ammar. Antonio Tajani souhaite verser "une seconde tranche avec la progression des réformes".
Crainte d'un effondrement économique de la Tunisie
Ces déclarations interviennent une semaine après des propos virulents du président tunisien Kaïs Saïed à l’encontre du FMI, qui conditionne l’octroi d’un prêt à des réformes économiques. "En ce qui concerne le FMI, les diktats provenant de l'étranger et qui ne mènent qu'à davantage d'appauvrissement sont inacceptables", a estimé le chef de l’État le 6 avril.
>> À (re)lire : Face à la pression migratoire, la France et l'Italie appellent à soutenir la Tunisie
Les dirigeants européens, Georgia Meloni en tête, craignent qu’un effondrement économique de la Tunisie accroisse les départs de migrants vers les côtes italiennes. "Si la Tunisie s'effondre, cela risque de provoquer des flux migratoires vers l'UE et entrainer une instabilité dans la région MENA [Moyen-Orient Afrique du Nord]. Nous voulons éviter cette situation", a insisté, le 20 mars, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.
Pour le ministre italien des Affaires étrangères, "aider l'économie tunisienne, c'est lutter aussi contre la migration".
La Tunisie, endettée à environ 80% de son PIB, a obtenu un accord de principe du FMI à la mi-octobre pour un nouveau prêt d'environ deux milliards de dollars pour l'aider à surmonter la grave crise financière qu'elle traverse. Mais les discussions sont dans l'impasse, faute d'engagement ferme de Tunis à mettre en œuvre un programme de réformes pour restructurer les plus de 100 entreprises publiques lourdement endettées et lever les subventions sur certains produits de base.
Plus de 31 000 arrivées en Italie
Le pays est depuis des années un lieu de départ pour les migrants, majoritairement subsahariens, qui essayent de rejoindre l’Europe via la Méditerranée. Certaines portions du littoral sont situées à seulement 150 km de l’île italienne de Lampedusa.
Mais les Tunisiens aussi fuient en masse le pays. L’inflation à plus de 10%, l’augmentation de la pauvreté et le creusement de la dette complètent la liste des raisons qui poussent les jeunes à envisager leur avenir ailleurs, en Europe.
>> À (re)lire : À l'approche de l'été, l'Italie annonce de nouvelles mesures pour désengorger Lampedusa
Depuis le début de l’année, plus de 31 000 personnes ont débarqué en Italie, contre environ 8 000 à la même période lors des deux années précédentes, d’après les chiffres de l'Organisation internationale des migrations (OIM).
Face aux hausses des arrivées, Rome a déclaré mardi 11 avril l'état d'urgence dans le pays pour six mois. La mesure comprend la mise en place d'un fonds de cinq millions d'euros destiné notamment à "décongestionner" le centre d'accueil de l'île de Lampedusa.
Et aussi
- Lampedusa fait face à un nouvel afflux de migrants tunisiens
- Fuir par la mer et atteindre l'Italie, le "destin inévitable" de milliers d'Égyptiens rongés par la pauvreté
- Méditerranée : deux morts et une vingtaine de disparus dans un naufrage entre la Tunisie et l’Italie
- Tunisie : plus de 14 000 migrants interceptés ou secourus en mer depuis janvier