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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : Le monde - Laurie Moniez - 08/01/2021

Dans le Nord, les migrants soumis à l’obligation de quitter le territoire se contentent de franchir la frontière belge puis de revenir, en toute légalité. Ce dispositif ubuesque mais parfaitement légal a été mis en place par un collectif d’aide aux étrangers pour leur éviter d’être expulsés.

Le jeudi 21 janvier, à midi, le ministère de l’intérieur publiera comme chaque année ses données annuelles sur l’immigration, l’asile et l’accès à la nationalité française. Parmi cette volée de chiffres figureront les quatorze opérations de reconduites à la frontière menées en 2020 sur ordre du préfet du Nord et visant 127 Roms installés dans la métropole lilloise. Sur le papier, ça augmente les statistiques. Sur le terrain, c’est ubuesque.

En effet, depuis 2010 et la « chasse aux Roms » lancée après le discours de Grenoble du président Sarkozy, des membres du collectif Avocats pour la défense des droits des étrangers ont trouvé la faille pour éviter aux Roumains, Bulgares ou Kosovars d’être placés en centre de rétention puis expulsés en charters. L’objectif des robes noires : prendre les devants et reconduire de façon volontaire leurs clients à la frontière… belge, et leur permettre de revenir aussitôt après. « A l’époque, on était fiers de ce pied de nez, se souvient l’avocat lillois Norbert Clément. C’est tellement révélateur de l’absurdité de l’administration. »

« C’est la troisième fois que je suis reconduit à la frontière. J’ai l’habitude. » Bogdan, 26 ans

Dix ans après, rien n’a changé. En ce mercredi de fin décembre 2020, c’est la famille roumaine Restas-Lingurar, installée dans un bidonville de Villeneuve-d’Ascq (Nord), qui se plie aux obligations de quitter le territoire français (OQTF) distribuées une semaine avant par les agents de la police aux frontières (PAF).

Depuis le 1er janvier 2014, un citoyen bulgare ou roumain, comme tout autre citoyen de l’Union européenne, peut librement séjourner en France pendant une période de trois mois, mais doit ensuite justifier d’un droit de séjour, notamment obtenu grâce à un contrat de travail.

Tranquilles pour au moins trois mois

A quelques jours de Noël, ils sont sept, parmi la trentaine de personnes installées depuis août 2018 dans des caravanes et des abris de fortune construits à partir de palettes, bâches et autres matériaux de récupération, à devoir quitter le territoire français. Il est 8 h 30 quand Bogdan, 26 ans, salue Mireille et Dominique, les deux bénévoles du Collectif solidarité Roms Lille Métropole venus leur prêter main-forte en jouant les chauffeurs. « Moi, c’est la troisième fois que je suis reconduit à la frontière, explique en français le jeune homme, au chômage depuis cet été. J’ai l’habitude. »

« Maintenant, on n’a plus qu’à entrer avec eux sur le territoire belge, et puis, après, on fait demi-tour, retour à Villeneuve-d’Ascq. C’est aberrant. » Un bénévole du Collectif solidarité Roms Lille Métropole

Avec six autres membres de sa famille arrivée de Roumanie en 2009, le voilà parti vers la PAF, au volant de son propre véhicule. Une fois sur place, ni lui ni aucun autre Rom n’entrent dans les locaux de la police. C’est Dominique Plancke, bénévole au Collectif solidarité Roms Lille Métropole et vice-président du Collectif national droits de l’homme Romeurope, qui vient présenter à l’accueil les sept récépissés leur permettant de récupérer leurs passeports, confisqués huit jours plus tôt.

Il est 9 h 15 et voilà les sept Roms et leurs accompagnateurs escortés par un véhicule banalisé de la PAF, direction la frontière. Il suffit de suivre le gyrophare pendant une dizaine de minutes le long de l’autoroute A27 pour arriver sur le parking du Noir Pignon, à Baisieux, à la frontière belge. C’est là que les deux agents de la PAF viennent remettre en mains propres les documents d’identité à Bogdan, Camelia, Maria et les quatre autres citoyens européens en situation irrégulière.

« Maintenant, on n’a plus qu’à entrer avec eux sur le territoire belge, et puis, après, on fait demi-tour, retour à Villeneuve-d’Ascq, expliquent les bénévoles, habitués à ces courts séjours en Absurdistan. C’est aberrant. Ça reste une politique du chiffre. Là, ils sont tranquilles pour au moins trois mois. » Les ressortissants ne disposant pas de moyens suffisants d’existence ne peuvent en effet séjourner en France au-delà d’une période de trois mois.

Grossir les statistiques du ministère de l’intérieur

Les 9, 23 et 28 décembre 2020, la PAF lilloise a ainsi raccompagné à la frontière belge vingt-six Roms des bidonvilles de la Poterne, à Lille, de la rue Alfred-de-Musset et du terrain de la Cruppe, à Villeneuve-d’Ascq. Certains Roms se sont sentis obligés d’acheter un paquet de cigarettes ou de faire le plein d’essence chez les voisins belges pour avoir un ticket de caisse en guise de justificatif avant de rentrer dans leurs cabanes de fortune de la métropole lilloise…

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Bien consciente du retour de ces personnes en France aussitôt la mesure d’éloignement exécutée, la préfecture précise « qu’il n’y a aucun objectif chiffré concernant le nombre d’arrêtés portant OQTF pris par la préfecture ni de statistiques propres aux populations roms. Dans le cas présent, les personnes quittent le territoire national de manière volontaire, il n’y a donc pas de reconduite forcée à la frontière par les autorités ».

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Lila Cherief, juriste au Collectif national droits de l’homme Romeurope, dénonce de son côté « des pratiques abusives dans la distribution de ces OQTF ». Selon elle, la délivrance collective d’OQTF ne permet pas à la préfecture de « procéder à un examen individuel des situations comme elle devrait le faire ». Selon maître Clément, la méthode permet surtout de « grossir les statistiques du ministère de l’intérieur et de remplir les chiffres du service étrangers de la préfecture ». Et la crise sanitaire n’a pas arrangé les choses pour ces populations discriminées dans leur pays d’origine et mal accueillies en France.

 

 


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