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La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

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Source : Médiapart - Faïza Zerouala - 11/05/2021

Des associations et syndicats s’inquiètent de l’article de la loi « sécurité globale » qui pénalise le squat et les occupations. Ils craignent que les militants et les plus précaires se retrouvent dans le viseur.

« Avec une telle loi, l’abbé Pierre, qui a participé à de nombreux squats, serait en prison. » Samuel Bargas, responsable du groupe de travail logement de la Ligue des droits de l’homme (LDH), dénonce un article de la loi « sécurité globale », définitivement adoptée le 15 avril. Cet article 1er bis A est passé inaperçu lors des débats mais inquiète fortement dix-huit associations, comme la Fondation Abbé Pierre, Droit au logement (DAL), la Ligue des droits de l’homme, Médecins du monde, ou encore le Secours catholique.

squats

Des associations lilloises tentent d’ouvrir un squat dans un bâtiment municipal à l’abandon depuis des années.

Extinction Rébellion mène la marche, avec Utopia. © Quentin Saison / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Pour tenter de faire censurer cet article, elles ont adressé une contribution au Conseil constitutionnel pour convaincre de sa non conformité à la Constitution. Avant elles, des parlementaires d'opposition (socialistes, communistes et écologistes) avaient saisi les « Sages ».

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Les associations le reconnaissent, cet article est passé « sous les radars », car il a été introduit dans la discussion parlementaire au Sénat sous la férule des LR Laurent Duplomb et Bruno Retailleau, soutenus par leurs collègues.

En modifiant l’article 226-4 du code pénal, il sanctionne les délits d’introduction et toute occupation de locaux vacants, professionnels, commerciaux, agricoles ou industriels. De surcroît, la sanction encourue est durcie et passe d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Désormais, les polices municipales et les gardes champêtres sont autorisés, avec tous les risques d’arbitraire que cela comporte, à constater ces infractions.

Ce qui va encore fragiliser des personnes déjà en situation de précarité, soulignent les associations, alors même que le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition, un cavalier législatif, soit une demande hors sujet, dans la loi ASAP (loi d’accélération et simplification de l’action publique) en décembre 2020.

À l’origine, les sénateurs – et c’est explicite dans leur discussion au Sénat – entendaient surtout empêcher les intrusions sur les exploitations agricoles de militants de la cause animale, comme ceux de l’association L214, pour dénoncer les conditions de vie des bêtes. Le sénateur Laurent Duplomb le formulait clairement lors des débats : « Il n’est pas acceptable que des gens puissent, en toute impunité, entrer dans des exploitations agricoles et placer des caméras. »

Mais, de fait, par capillarité, cet article durcit la législation antisquat et élargit la notion de domicile d’autrui, réservée aux résidences principales et secondaires, en l’étendant à tout « local professionnel, commercial, agricole ou industriel ». Toute personne qui squatterait un lieu de ce type serait passible d’écoper de sanctions. Ce qui fragiliserait davantage des personnes déjà en difficulté.

Lorraine Questiaux, l’avocate portant la contribution des associations, pointe un sujet « hautement politique ». Cet article, « relativement anodin » selon elle, tord la notion de domicile principal et l’étend aux résidences secondaires, aux locaux commerciaux, industriels ou agricoles, ce qui entre « en contrariété avec l’esprit de la Constitution, au détriment de la dignité humaine et de la sécurité matérielle des plus faibles ».  Elle craint aussi qu’étendre les compétences d’interpellation à la police municipale soit dangereux. Elle pourra rendre compte à un officier de police judiciaire d’une intrusion et lui présenter l’auteur de l’infraction sur-le-champ ou le retenir le temps nécessaire.

Manuel Domergue, de la Fondation Abbé Pierre, regrette le flou ainsi entretenu autour de la notion de domicile, laissée aujourd’hui à l’appréciation du juge. En 2019, 1923 ménages ont été assignés pour occupation « sans droit, ni titre », rappelle Manuel Domergue. « L’ordre de grandeur est faible, le squat se fait dans des locaux vides, ce qui ne lèse personne. En réalité, les personnes squattent des friches industrielles, des hangars, des bureaux vides. Pour nous, les squatteurs sont légitimes dans le cadre du droit au logement, n’importe qui ferait ça pour y dormir et y habiter, il y a un état de nécessité. Plutôt que de sanctionner, l’État devrait s’excuser. »

Les associations pointent aussi du doigt le fait que cet article pourra également servir à criminaliser toutes les actions militantes qui mettent l’occupation au centre de leur champ d’action et toute autre manifestation de désobéissance civile.

Me Lorraine Questiaux dénonce l’insécurité juridique engendrée par cet article.  De son côté, Samuel Bargas, responsable du groupe de travail logement à la LDH, dénonce « une loi incompréhensible et dangereuse qui risque de marginaliser la misère et les sans-abri ».

Et de citer tous les champs possibles d’application de la loi : les gens du voyage et les Roms pourront être visés s’ils occupent des terrains, tout comme ceux qui occupent les ZAD, comme à Notre-Dame-des-Landes ou au triangle de Gonesse. Les occupations de bâtiments publics pourront être sanctionnées, comme lorsque des parents s’installent, de manière pacifique, pour une nuit dans une école pour lutter contre des fermetures de classe. Bref, les conséquences de cet article sont vastes.

Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL, dénonce, de son côté, « un contexte général populiste » avec une criminalisation des squatteurs dans un débat posé selon de mauvais termes : « Il n’y a jamais d’occupation de résidences principales comme veulent le faire croire les chaînes d’information en continu. » Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé Pierre, regrette que ce sujet, « un serpent de mer », revienne grâce à la droite sur le devant de la scène et porte sur « quelques affaires de squat montées en épingle par les médias et politiques ».

Jean-Baptiste Eyraud souligne que 3,1 millions de logements sont vacants, selon l’Insee, qu’il est dangereux de criminaliser davantage le squat. « C’est une double lame, on pénalise l’occupation de locaux permanente de lieux vacants et on criminalise les occupations destinées à manifester. Le mouvement social va être bâillonné. » Le DAL est particulièrement concerné, regrette-t-il : « On a d’autres modes d’action pour que les pouvoirs publics respectent les droits des mal-logés, mais ça nous enlève une marge de manœuvre. »

Le porte-parole raconte qu’une action comme celle menée en février dernier, lorsque 70 sans-abri ont investi l’Hôtel-Dieu, pourra désormais être durement sanctionnée. « Pendant la vague de froid, on a envahi l’hôpital, on s’est mis sous une coursive, c’est l’espace public, on n’a dérangé personne et le préfet de région a envoyé une équipe pour trouver des hébergements dans les heures qui ont suivi. Les occupations, c’est important, ça nous visibilise, ça fait du bruit dans les médias. Maintenant, ce sera pénalisé. Macron veut juguler toutes les résistances. »

Pour l’avocate Lorraine Questiaux, « on organise une police des contre-pouvoirs et de la démocratie. Ces peines sont dissuasives et vont entraver les actions associatives et celles des corps intermédiaires en faveur de la justice sociale et pour résister à l’autoritarisme du pouvoir ».

Il faudrait, selon Samuel Bargas, engager plutôt une réflexion pour renforcer l’obligation légale de l’État à fournir des places d’hébergement et à mettre à l’abri en urgence les plus démunis. La ministre du logement, Emmanuelle Wargon, a annoncé, fin avril, la création d’un observatoire des squats pour évaluer la situation.

Manuel Domergue, de la Fondation Abbé Pierre, caresse plutôt l’espoir que cet article « disproportionné » soit dénoncé comme un cavalier législatif par le Conseil Constitutionnel.

 

 


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