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Source : INFO MIGRANTS - Louis Witter - 23/08/2021Louis Witter - 23/08/2021

Après la chute de Kaboul et la prise de pouvoir des Taliban, le gouvernement britannique a annoncé mardi 17 août, que le pays allait accueillir quelque 20 000 ressortissants afghans. Une nouvelle reçue avec amertume par les migrants bloqués depuis plusieurs mois à Calais et Grande-Synthe, de l'autre côte de la Manche.

Au cœur du camp de Grande-Synthe, près de la ferme des Jésuites, de la fumée s’échappe de trois cabanons. Faits de bric et de broc, ces petits restaurants tenus en majorité par des Kurdes irakiens de Kirkouk ou d’Erbil vendent des sandwichs, du soda ou des cigarettes. Ici, à une quarantaine de kilomètres de Calais, près de 300 personnes, dont des familles et des enfants, attendent leur passage de l’autre côté de la Manche. Les Afghans ont élu domicile au bout du chemin, sous les grands pylônes des lignes à haute tension qui vrombissent au dessus de leurs têtes. Assis autour d’une théière dont l’eau commence à peine à bouillir, Nazer, Berile et Amir Khan remontent le fil des derniers jours.

Mercredi 18 août, après la tombée de Kaboul, la capitale afghane, aux mains des Taliban, le Premier ministre britannique Boris Johnson a déclaré que le Royaume-Uni allait accueillir 20 000 réfugiés d’Afghanistan. Nazer lève les yeux au ciel et rit : "Alors, je n’ai pas le numéro de Boris Johnson [le Premier ministre britannique, ndlr], mais si je l’avais, je lui dirais, qu’ici, nous avons déjà fait les trois quarts du chemin et qu’on attend !"

>> À relire : Les migrants de Calais déterminés à traverser la Manche malgré la "militarisation de la frontière"

Arrivé dans la région il y a quatre mois, le trentenaire tente chaque soir, ou presque, la traversée en camion vers le Royaume-Uni. La veille au soir encore, il s’est fait surprendre par la sécurité du port, qui l’a remis à la police. Nazer sort de sa poche le procès verbal d’audition : "Ce papier est valable sept jours, explique t-il. Donc si je me fais arrêter par la sécurité ces prochains jours, ils ne me remettront pas à la police. Mais si dans huit jours je me fais de nouveau prendre, ils rappellent la police et je suis de retour au poste pour quelques heures."

"Nous accueillir en Angleterre, oui, il le faudrait"

Nazer est presque une exception. Depuis début 2020 et le premier confinement lié à la pandémie de Covid-19, les traversées en camion ont été délaissées au profit des passages en bateaux pneumatiques depuis les côtes. Plus dangereux, plus mortels et surtout plus chers, ils sont la dernière solution pour celles et ceux qui attendent ici, parfois durant de longs mois, au rythme des expulsions. Le 20 août, une cinquantaine de policiers sont encore venus expulser de leurs tentes les personnes qui survivent ici.

Sur le port de Calais, le 22 août 2021. Les barrières et caméras y sont déployées toute l'année pour empêcher les exilés de monter dans les camions en partance pour l'Angleterre. Crédit : Louis Witter pour InfoMigrants.
Sur le port de Calais, le 22 août 2021. Les barrières et caméras y sont déployées toute l'année pour empêcher les exilés de monter dans les camions en partance pour l'Angleterre. Crédit : Louis Witter pour InfoMigrants.

 

Berile balaye le camp du regard : "Vous pensez que beaucoup de personnes pourraient vivre ici dans ces conditions ? Alors nous accueillir en Angleterre, oui, il le faudrait". Arrivé depuis la Turquie il y a cinq jours, ses traits tirés témoignent de son état d’épuisement lié à son long voyage : Berile a fait près de 3 000 kilomètres pour rejoindre Grande-Synthe.

>> À relire : "Afghans en France : entre 'cynisme' des préfectures et protection incertaine"

À ses côtés, Amir Khan est le plus jeune du groupe. À seulement 14 ans, il est parti seul d’Afghanistan l’année dernière. Aujourd'hui, loin de sa famille, il n’ose pas leur décrire ses conditions de vie. Alors que deux bénévoles d’une association mandatée par l’État lui parlent des accueils et hébergements (souvent saturés), il refuse poliment. Il préfère rester ici, à tenter de passer de l’autre côté avec ses compatriotes. Depuis Kaboul, sa famille demande souvent de ses nouvelles : "Ma mère s’inquiète énormément, mais elle veut rester en Afghanistan avec le reste de ma famille. Partir, ils n’y pensent même pas. Alors, une fois en Angleterre si j’y arrive, je pourrai apprendre l’anglais, étudier la médecine et devenir docteur".

Des appels de Kaboul

Côté associations, la tension aussi est palpable. "Chaque jour, la situation en Afghanistan se dégrade et les gens ici nous en parlent", explique une bénévole belge, présente à Grande-Synthe avec sa famille. Ces derniers jours, les téléphones d’urgence d’Utopia 56 ne cessent de sonner et reçoivent des dizaines de messages de citoyens afghans, ex-personnels de l’Otan ou associatifs qui cherchent à fuir les Taliban.

Marguerite Combes, coordinatrice de l’association à Calais, raconte comment les Afghans en attente de papiers ici ou à Grande-Synthe ont désormais peur pour leurs familles : "Beaucoup d’exilés nous demandent d’aider leurs familles à les rejoindre en France. Nous avons eu aussi récemment des appels de personnes statutaires ou sous protection subsidiaire qui sont retournés en Afghanistan pendant les vacances et qui se retrouvent coincés là-bas."

Avec la mise en place d’un numéro d’urgence par le ministère des Affaires étrangères, l’association a pu les guider pour organiser leur retour. Mais elle reçoit désormais également depuis l’Afghanistan des appels à l’aide : "Des Afghans nous supplient de leur venir en aide. Ils envoient leurs documents, leurs papiers, tout pour tenter de venir en France, on ne sait même pas comment ils ont eu notre numéro. Ils expliquent en anglais leur situation et demandent des informations sur comment quitter le pays. Là, par exemple, un homme explique que son fils travaillait pour le gouvernement puis pour la Croix-Rouge et veut partir. Après avoir envoyé la photo des passeports, il a écrit 'Save my family lives and childs'".

Dans le camp de Grande-Synthe, le 20 août 2021. Afghans, Irakiens, Kurdes, Iraniens et Pakistanais y vivent parfois depuis de longs mois. Crédit : Louis Witter pour InfoMigrants.
Dans le camp de Grande-Synthe, le 20 août 2021. Afghans, Irakiens, Kurdes, Iraniens et Pakistanais y vivent parfois depuis de longs mois. Crédit : Louis Witter pour InfoMigrants.

 

"On a mis un an pour arriver ici"

Sur le camp de Grande-Synthe, la même inquiétude règne chez les exilés. Tandis qu’ils marchent vers un point d’eau, Moban et son petit frère confient ne pas avoir confiance dans les promesses des politiques. "On ne les croit pas. Ça fait un mois qu’on est ici, un mois que l’on attend de traverser. Après un an pour arriver ici, on n’y croit pas", lâche Moban. Lui a la vingtaine, son petit frère a 13 ans. Depuis une semaine, en Afghanistan, leurs proches n’ont plus accès à Internet. "On a peur pour notre famille. Qu’est-ce qui va se passer pour elle ?", demande le plus jeune des deux. En attendant un hypothétique accueil, sur les campements, les associatifs font de la prévention des risques une de leurs priorités.

Face à la multiplication des traversées en bateau, ils se démènent pour prévenir les exilés des dangers de la mer. Près de 8 000 personnes seraient arrivés par les côtes depuis le début de l’année, selon la BBC. Alors ils leur font retenir le 112, seul numéro en cas d’urgence et montrent comment, même sans réseau, trouver sa localisation GPS pour pouvoir l’indiquer en cas de détresse au large. Car malgré les discours d’accueil et les promesses d’Emmanuel Macron et de Boris Johnson, la surveillance des côtes françaises et britanniques s’est accrue tout l’été, rendant plus complexe et périlleuse la traversée de la Manche pour les exilés.

 

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