Inscription au Bulletin  bulletin icon    Notre page FacebookNotre page Twitter  Bonjour Visiteur

Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : Le monde - Cécile Ducourtieux- 14/04/2022

Le gouvernement britannique a annoncé, jeudi, la signature d’un accord avec Kigali, qui suscite de nombreuses critiques.

C’est une première européenne, moralement et légalement questionnable, qui révolte les ONG d’aide aux réfugiés. Après des mois de tractations, le gouvernement conservateur britannique a annoncé, jeudi 14 avril, la signature d’un accord avec le Rwanda, pour envoyer dans ce pays d’Afrique centrale les personnes qui traversent la Manche « illégalement », selon les autorités britanniques (en bateaux pneumatiques ou cachés dans des camions). Ces personnes, venues pour chercher l’asile au Royaume-Uni, seront hébergées au Rwanda, à 6 400 kilomètres des côtes britanniques, où leurs demandes seront examinées. Et si elles décrochent le statut de réfugié, ce sera pour rester au Rwanda – et non pour revenir au Royaume-Uni.

« En finir avec l’immigration illégale est le seul moyen d’accueillir ceux qui ont vraiment besoin de protection », estime Boris Johnson

Ce partenariat négocié depuis neuf mois entre Londres et Kigali vise d’abord à décourager les passages. Mais Boris Johnson a préféré, jeudi, mettre en avant la lutte contre les passeurs « qui engendrent trop de misère humaine et de morts », en référence aux vingt-sept personnes noyées dans la Manche en novembre 2021. « Hier, 600 personnes ont traversé la Manche, dans les prochaines semaines, les passages pourraient passer à 1 000 par jour. D’autres personnes risquent de perdre leur vie. En finir avec l’immigration illégale est le seul moyen d’accueillir ceux qui ont vraiment besoin de protection », a ajouté le premier ministre conservateur.

Lire aussi Tous les migrants noyés dans la Manche à la fin de novembre ont désormais été identifiés

En déplacement à Kigali, jeudi, pour finaliser l’accord, sa ministre de l’intérieur, Priti Patel, l’a jugé « créatif » et « compassionnel ». « Le Rwanda a déjà accueilli de nombreux réfugiés, c’est un pays sûr, qui respecte l’Etat de droit », a précisé cette brexiteuse de la première heure, connue pour ses positions très à droite. A ses côtés, le ministre rwandais des affaires étrangères, Vincent Biruta, s’est félicité des « opportunités » générées par Londres qui va verser une première tranche de 120 millions de livres sterling au pays, qui, en retour, « fournira un toit et des formations » aux déplacés, a fait savoir le ministre.

Lire aussi : Londres-Kigali : Boris Johnson dévoie le droit d’asile
« Sous-traitance » des migrants à un pays du Sud

Le Royaume-Uni est le premier pays européen à concrétiser une « sous-traitance » de ses migrants à un pays du Sud. D’autres sont également tentés, comme le Danemark, lui aussi en tractations avec Kigali. Londres prend modèle sur Canberra, l’Australie ayant envoyé dès le début des années 2000 ses migrants sur les îles Manus et Nauru. Une politique très controversée, engendrant de grandes souffrances morales et physiques chez les déplacés.

Seront concernées par les transferts au Rwanda toutes les personnes venues « par des voies illégales » depuis un pays tiers sûr (la France, par exemple), sauf les mineurs – les Ukrainiens tentant la traversée de la Manche risquent théoriquement d’être éligibles. Le home office ne devrait, cependant, pas séparer les enfants de leurs parents. Les adultes pourraient faire appel mais sont susceptibles d’être détenus en attente de leur déportation. Le Rwanda pourra refuser les arrivées des personnes ayant un casier judiciaire. L’accord est rétroactif et concerne toutes les personnes arrivées depuis le 1er janvier. Le gouvernement Johnson a, en outre, annoncé que la Royal Navy prenait immédiatement le relais des gardes-côtes pour surveiller les arrivées de small boats sur ses côtes.

Tobias Ellwood, président de la commission défense du Parlement, a expliqué que l’annonce de cet accord est un moyen « de distraire l’attention du “partygate” »

Enver Solomon, directeur du Refugee Council, principale association d’aide aux migrants du Royaume-Uni, dénonce une politique « qui va engendrer encore plus de souffrances, de chaos et d’énormes dépenses, estimées à 1,4 milliard de livres par an ». La politique de Johnson est « amorale, dispendieuse et impossible à mettre en œuvre », juge Yvette Cooper, ministre de l’intérieur du cabinet fantôme travailliste.

Chez certains conservateurs, le malaise est aussi palpable : en mars déjà, l’ex-secrétaire d’Etat au développement international, Andrew Mitchell soulignait qu’un accord comme celui qui vient d’être signé avec le Rwanda « sera plus coûteux que d’héberger les réfugiés au Ritz ». Jeudi, Tobias Ellwood, président de la commission de défense du Parlement, a expliqué que l’annonce est un moyen « de distraire l’attention du “partygate” », alors que Boris Johnson vient de recevoir une amende de la police dans le cadre du scandale sur les fêtes à Downing Street durant le confinement.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés « Partygate » : la police met Boris Johnson, sa femme et son chancelier de l’Echiquier à l’amende
Déni du droit d’asile

L’accord intervient avant les élections municipales du 5 mai en Angleterre et en Ecosse. L’immigration est une des premières préoccupations des électeurs conservateurs. Or, jusqu’à présent, le gouvernement Johnson n’a pas réussi à tenir une des principales promesses du Brexit : « reprendre le contrôle » des frontières. Le nombre des traversées de la Manche s’est envolé en 2021, avec plus de 28 000 passages réussis. Depuis le début de l’année, 4 600 personnes sont aussi arrivées en small boats.

Le Brexit a privé Londres de la possibilité d’invoquer le règlement de Dublin pour renvoyer dans l’Union européenne des migrants y ayant déjà déposé une demande d’asile. Et le gouvernement Johnson s’est montré incapable de renégocier les accords du Touquet avec Paris (la France s’était engagée en 2004 à cosurveiller la frontière maritime du Royaume-Uni), refusant d’installer dans le nord de la France un centre consulaire où les déplacés pourraient déposer leur demande d’asile pour le Royaume-Uni.

Or, une bonne part du problème migratoire transmanche est liée au fait que ces personnes ne peuvent solliciter l’asile qu’une fois sur le sol britannique. Seul autre moyen de rejoindre le pays : être éligible à l’un des mécanismes humanitaires mis en place par Londres, pour les Syriens, les Hongkongais, les Afghans ou les Ukrainiens fuyant la guerre. Mais ces demandes sont souvent laborieuses – le mécanisme « Homes for Ukraine » est notoirement défaillant.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Réfugiés ukrainiens : le Royaume-Uni critiqué pour la lenteur de délivrance des visas

Considérer que toutes les personnes arrivant hors de ces étroites voies autorisées puissent être expulsées vers le Rwanda reviendrait à leur dénier le droit d’asile au Royaume-Uni. Déjà, à la fin de 2021, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés jugeait que la loi Nationality and Borders Bill autorisant les transferts de demandeurs d’asile « contredit fondamentalement les engagements du gouvernement [britannique] de respecter ses obligations au regard de la Convention [de Genève] sur les réfugiés ». Cette loi n’est toujours pas adoptée à Westminster, où les Lords font de la résistance.

Le Rwanda peut-il être considéré comme un pays sûr ? L’organisation Human Rights Watch en dresse un constat sévère, pointant « des détentions arbitraires, des mauvais traitements et la torture dans des centres de détention non officiels, qui sont des pratiques communes ». Et l’accord avec Kigali est-il seulement applicable ? Boris Johnson a admis s’attendre « à ce qu’il soit attaqué en justice » et qu’il « mette du temps à prendre pleinement effet ».

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés En pleine guerre en Ukraine, Boris Johnson veut faire adopter une loi « anti-réfugiés »

Calendrier d'Événements

Lun Mar Mer Jeu Ven Sam Dim
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
29
30
31
Sauvegarder
Choix utilisateur pour les Cookies
Nous utilisons des cookies afin de vous proposer les meilleurs services possibles. Si vous déclinez l'utilisation de ces cookies, le site web pourrait ne pas fonctionner correctement.
Tout accepter
Tout décliner
En savoir plus
Essentiel
Ces cookies sont nécessaires au bon fonctionnement du site, vous ne pouvez pas les désactiver.
Session de l'utilisateur
Identifie la session ouverte par l'utilisateur
Accepter