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Source : InfoMigrants - Marlène Panara - 20/05/2022

Sara est originaire du sud-ouest de la Côte d’Ivoire. Tombée enceinte à 16 ans, elle a dû quitter le lycée pour s’occuper de son bébé. Près de 15 ans plus tard, séparée du père de sa fille, installé en France avec l'enfant, elle a décidé de partir au Maroc pour "vivre mieux" et sortir de la précarité. Mais dès son arrivée dans le pays, la jeune femme s’est heurtée à une dure réalité : vivre dans le royaume en tant que demandeuse d’asile relève, bien souvent, de la survie.

"Je suis arrivée au Maroc en novembre 2020. Avant de partir, je m’étais assurée d’avoir du travail en arrivant. Une dame qui vivait ici a servi d'intermédiaire, et grâce à elle, j'ai obtenu une promesse d’embauche d'employée de maison. Une semaine après avoir posé le pied ici [dans la région de Casablanca ndlr] j’ai commencé à travailler pour une famille. Ça ne s’est pas bien passé. C’était trop difficile, les journées n’en finissaient pas et je n’avais pas de très bonnes relations avec mes employeurs. J’ai demandé à dame qui m'avait aidée si je pouvais changer de maison, elle a accepté.

Mais ça n’a rien changé. Le quotidien était toujours aussi difficile. J’enchaînais les tâches domestiques toute la journée, presque sans pause. Du matin au soir, je m’occupais de la maison, pour un salaire très bas. C’était de l’exploitation. Qui peut vivre comme ça ?

 

Le bureau du Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) de Rabat traite les demandes d'asile déposées au Maroc. Crédit : InfoMigrants
Le bureau du Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) de Rabat traite les demandes d'asile déposées au Maroc. Crédit : InfoMigrants

 

Puis les semaines ont passé et je n’y arrivais toujours pas. Le travail était de plus en plus dur. La dame qui m’avait trouvé les familles s’est rendue compte que ça n’allait pas, que j’avais beaucoup de mal à suivre. Ça l’a mise en colère, elle m'en voulait et m'a renvoyée fin février 2021. Quelques jours plus tard, début mars, elle m’a tendu un piège. Elle m’a livrée à un groupe d’hommes, ils ont essayé de me violer. J’ai réussi à m’enfuir. Mais aujourd’hui, je suis traumatisée. Je ne me sens plus du tout en sécurité ici : je me voile et je porte toujours un masque. J’ai tout le temps peur qu’il m’arrive quelque chose. C'est justement après cette agression que j'ai déposé ma demande d'asile, le 18 mars.

Pour demander l’asile au Maroc, il faut se rendre au bureau du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), à Rabat. Les exilés doivent y remplir un formulaire de renseignements. Un rendez-vous est ensuite fixé pour enregistrer la demande d’asile. Une fois la procédure enclenchée, un certificat de demandeur d’asile est remis à la personne concernée, qui lui accorde certains droits. Elle sera recontactée plusieurs mois plus tard - voire plusieurs années dans certains cas - par le HCR pour un entretien.

"Je ne sais même pas où vit mon enfant"

Depuis, je n’ai pas retrouvé d’emploi. J’ai trouvé de quoi me loger, je vis dans un appartement à Mohammedia [une ville à côté de Casablanca]. Mais pour manger et pour m’habiller, je fais la manche, et je fais parfois des ménages dans des bureaux "au noir". Rien de tout ce que je porte n’est à moi [Sara désigne son legging noir et l'épaisse veste beige en velours qu'elle porte malgré une température qui avoisine ce jour-là les 30 degrés ndlr].

>> À (re)lire : Maroc : témoignage de Serge, l'un des 125 migrants refoulés du Rocher espagnol de Vélez

À un moment, j’ai envisagé de rentrer en Côte d’Ivoire. Mais ce serait revenir en arrière, et puis la vie est tellement compliquée là-bas aussi. J’ai aussi pensé à partir en France, où mon ex-mari vit avec ma fille. Je l’ai supplié de m’aider à venir, car je pensais vraiment qu’il pouvait faire quelque chose pour moi. Mais il n’a rien voulu savoir. Aujourd’hui, je n’ai plus de nouvelles. Je ne sais pas même où vit mon enfant, ce qu’elle fait. Ça me rend tellement triste.

 

Le sud de l'Espagne n'est situé qu'à 14 kilomètres du nord du Maroc. Crédit : InfoMigrants

 

J’étais si désespérée que je me suis dit : ‘Je vais me débrouiller seule et passer par la Méditerranée’. Et puis après j’ai pensé à ma mère. Elle vit seule en Côte d'Ivoire depuis que mon père est mort et je lui envoyais de l'argent quand j'en gagnais un peu comme employée de maison. Je suis son seul soutien, elle compte sur moi, je ne peux pas prendre le risque de l’abandonner pour toujours. C’est trop dangereux pour elle comme pour moi. Si je meurs, comment est-ce qu’elle va faire ?

En 2021, les Nations Unies estimaient que près de 1 255 personnes avaient perdu la vie dans leur traversée maritime – y compris via la mer Méditerranée - jusqu'en Espagne. D'après l'ONG Caminando Fronteras, ce chiffre est quatre fois plus élevé. L'ONG a dénombré l'année dernière 4 404 disparus en mer.

Depuis que je l'ai déposée la première fois, je n’ai jamais eu de nouvelles de ma demande d’asile. On m’a demandé de remplir, encore, des formulaires. Je n’y comprends plus rien.

Ces derniers temps, c’est plus difficile qu’au début, car je ne trouve plus aucune solution à mes problèmes. J’ai l’impression d’être dans une impasse. Je sens bien que dans la tête, ça ne va pas vraiment pas. Parfois, j’ai l’impression de devenir folle.

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