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La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

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Source : médiapart - Nejma Brahim - 08/09/2022

Selon la plateforme Alarm Phone, qui était en lien avec l’embarcation partie depuis les côtes libanaises, deux enfants seraient morts à bord faute de vivres. Une fillette est quant à elle décédée alors qu’elle était héliportée vers un hôpital crétois.

L’Europe a une nouvelle fois abandonné, en toute impunité, des exilés en détresse en Méditerranée centrale. Le 25 ou le 26 août – la date n’a pas encore pu être déterminée –, un bateau transportant près de 60 personnes de nationalité libanaise ou syrienne est parti depuis le Liban pour tenter de rejoindre l’Europe.

Selon la plateforme en ligne Alarm Phone, qui repère les embarcations en détresse en mer et établit le contact avec les exilés ou leurs proches pour tenter de déclencher un sauvetage de la part des autorités compétentes, 8 femmes et 15 enfants étaient à bord.

Les exilés ne pensaient pas rester si longtemps en mer et sont rapidement tombés à court de vivres. « On nous a contactés le septembre en nous indiquant que l’embarcation était partie neuf jours plus tôt, nous indique Alarm Phone. Ils n’avaient plus d’eau ni de nourriture. On nous a signalé deux enfants décédés et une femme enceinte sur le point d’accoucher. »

La plateforme tente alors de joindre le centre de coordination et de sauvetage maltais, en vain. « Au moment où ils nous contactent, ils sont juste à la limite de la zone SAR [de recherche et de secours – ndlr] maltaise. Ils sont ensuite passés dans celle de la Grèce, qui n’a pas répondu à nos alertes non plus. »

Un bateau avec des personnes migrantes secouru dans les eaux territoriales maltaises par un voilier de l'ONG Open Arms, le 24 mai 2022. © Photo Valéria Ferraro / Agence Anadolu via AFP

En désespoir de cause, Alarm Phone alerte également les autorités italiennes. Plusieurs navires marchands sont ainsi passés près de l’embarcation et auraient pu porter secours aux personnes en détresse, assure la plateforme. « C’est une zone où il y a énormément de passage, comme une sorte d’autoroute en mer. Mais les navires sont réticents à intervenir pour différentes raisons. »

Ces derniers peuvent en effet recevoir des amendes pour avoir sauvé des migrants en mer, être bloqués en mer pour une durée indéterminée faute d’autorisation de les débarquer, ou n’avoir pas les moyens de s’occuper des rescapés à bord.

Une politique d’« omission de secours » déjà dénoncée par le passé

Une situation « absolument anormale » pour Sara Prestianni, responsable des programmes au sein du réseau EuroMed Droits. « Le fait que personne n’intervienne est une atteinte au droit à la vie, et au droit maritime, qui oblige tout État, tout navire, à porter secours à toute personne en détresse sans se préoccuper de son statut juridique et de l’acheminer vers un port sûr. On fait face à une politique d’omission de secours qui est très grave. Mais c’est une réalité qu’on a déjà vue à plusieurs reprises en Méditerranée. »

Quant aux cargos qui refusent d’intervenir, elle évoque une « politique de dissuasion et de criminalisation des navires marchands » ayant pu secourir des exilés par le passé, et se souvient du cas précis du navire marchand danois Maersk-Etienne, resté bloqué durant plus d’un mois en août 2020 avec près de 30 exilés à son bord sans pouvoir les débarquer à Malte, qui refusait de les « prendre ». L’Italie avait finalement répondu présent.

« En 2011, il y a eu aussi un autre cas de “left-to-die boat”, avec un bateau qu’on a laissé errer en mer durant dix jours. Presque tous les occupants étaient arrivés décédés », complète Sara Prestianni.

Cette fois, la soixantaine d’exilés a finalement été secourue par le navire marchand BBC Pearl, qui les a débarqués en Crète le 6 septembre, après qu’ils avaient dérivé durant près de 13 jours en mer. « Une fillette est décédée lors de son transport vers l’hôpital », ajoute Elena Bizzi, coordinatrice du programme migration et asile à EuroMed Droits. Elle aurait perdu connaissance alors qu’elle était encore à bord de l’embarcation et serait morte de déshydratation et de famine, selon Alarm Phone et plusieurs médias grecs.

Ce drame montre une fois de plus l’absence totale de Malte, qui ne répond plus, depuis des années, aux appels de détresse des exilés, d’Alarm Phone ou des ONG affrétant un navire de sauvetage en Méditerranée centrale, comme SOS Méditerranée et son Ocean Viking.

« Le cas de Malte est emblématique de cette politique d’omission de secours. L’île a la plus grande zone SAR de la Méditerranée mais a vu seulement moins de 1 000 personnes arriver sur son territoire l’an dernier », dénonce Sara Prestianni.

Et d’ajouter : « Il est regrettable que les institutions européennes ne condamnent pas ces pratiques, qui sont illégales. Malte déroge à ses obligations et il n’y a pourtant pas eu de déclarations officielles ou de procédures d’infraction à son encontre. » En 2020, comme le relatait Mediapart, Malte était allé jusqu’à enrôler des chalutiers privés pour repousser des migrants en mer.

Sans doute aussi parce que d’autres États membres violant eux-mêmes d’autres conventions internationales en matière de migration et d’asile, supposent les deux membres d’EuroMed Droits, qui donnent pour exemple la systématisation des refoulements en mer en Grèce. « C’est comme si on pouvait plus facilement fermer les yeux lorsqu’il s’agit de violations des droits fondamentaux des migrants. »

Les Libanais et Syriens contraints demprunter des routes toujours plus dangereuses

« On aimerait voir la situation changer, que les exilés n’aient pas besoin de risquer leur vie en mer », ajoute Alarm Phone, qui milite pour l’ouverture de routes « sûres et légales » et évoque un système « raciste et insensé », dans une « Europe forteresse ».

Ce drame récent est révélateur d’une autre tendance, alors que les départs par la mer depuis le Liban tendent à s’intensifier au vu de la crise majeure que connaît le pays. Face aux refoulements quasi systématiques que pratique Chypre à l’arrivée des migrants aux abords de ses côtes, les exilés sont de fait poussés à emprunter d’autres voies pour tenter de gagner l’Europe.

En novembre dernier, un bateau avec à son bord des Libanais et des Syriens a été refoulé par Chypre et a donc continué vers l’Italie.
Elena Bizzi, responsable du programme asile et migration à EuroMed Droits

« À EuroMed Droits, on documente et dénonce les pratiques illégales de refoulement en mer de la part de Chypre depuis mars 2020. En novembre dernier, un bateau avec à son bord des Libanais et des Syriens a été refoulé par Chypre et a donc continué vers l’Italie. On voit donc que ces pratiques mènent les personnes à emprunter des routes beaucoup plus dangereuses », note Elena Bizzi.

C’est un malheureux classique dans l’histoire des migrations, complète sa collègue Sara Prestianni. « L’ouverture d’autres routes, ou les tentatives de passage par d’autres routes, est une conséquence des pratiques illégales des États européens et aussi, dans ce cas particulier, de la mauvaise gestion de l’accueil à Chypre pour les personnes ayant réussi à rejoindre l’île, le plus souvent par la terre. »

Bien qu’il soit encore tôt pour parler d’une nouvelle route migratoire – les chiffres des arrivées dans le sud de l’Italie ne permettent pas de savoir si toutes les personnes sont parties depuis le Liban –, force est de constater que les départs depuis le Liban se font de plus en plus nombreux et que certaines embarcations débarquent en effet en Italie, comme en juin dernier.

« Les personnes ont passé au moins cinq jours en mer, sans nourriture ni eau et sans que personne ne leur porte secours », précise Elena Bizzi.

En avril, un naufrage au large des côtes libanaises faisait plusieurs morts et une trentaine de disparus. Fin août, un sous-marin d’exploration appartenant à l’ONG australienne AusRelief a retrouvé les restes de plusieurs victimes, à 500 mètres de profondeur, encore coincées dans leur embarcation.

La mission de recherche a depuis été stoppée à la demande de l’armée libanaise, qui a évoqué des « risques sécuritaires ». Après le naufrage, plusieurs familles de victimes et de disparus avaient accusé les garde-côtes libanais d’avoir provoqué une collision avec l’embarcation pour l’empêcher de faire la traversée.

 


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