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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : le monde - Grégoire Mérot - 16/09/2022

Moins d’un mois après la visite de Gérald Darmanin, les élus de Mayotte ont fermé écoles et administrations, mercredi 14 septembre. Une action-choc soutenue par la majeure partie de la population pour protester contre l’insécurité dans l’île.

La route est étonnamment calme, ce jeudi 15 septembre au matin. Les sempiternels bouchons de l’île de Mayotte ont laissé place à un trafic fluide pour le plus grand bonheur des automobilistes, habitués à des trajets de trois heures pour parcourir une vingtaine de kilomètres. La route est calme et, pourtant, ses abords portent encore les stigmates des violences qui font le quotidien du département ultramarin. A Nyambadao, dans le sud de l’île, une maison partiellement brûlée rappelle l’incendie volontaire qui l’a touchée alors qu’une famille se trouvait à l’intérieur, vendredi 9 septembre. Çà et là, des carcasses de voitures calcinées. Partout, des traces noires et rugueuses zèbrent le bitume gris, restes de barrages enflammés.

Sur l’île, les souvenirs des affrontements récents entre bandes rivales ou avec les forces de l’ordre, comme les sons des caillassages de bus remplis d’élèves effrayés ou de voitures en détresse sont toujours vifs. Dans l’air, flotte encore l’odeur âcre des gaz lacrymogènes, dont les cartouches brûlées jonchent le sol.

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C’est donc cela une « île morte » ? Mercredi 14 septembre, face à la flambée de violences dans laquelle Mayotte semble inéluctablement engagée, les maires des différentes communes (15 sur 17) ont surpris le département en décidant de fermer les écoles et administrations locales. Le conseil départemental a emboîté le pas de ce mouvement inédit en suspendant le ramassage scolaire. Faute de transports en commun, les collèges et lycées sont déserts. Une intersyndicale a rappelé aux salariés leur droit de retrait quand le centre hospitalier de Mamoudzou et ses dispensaires satellites ont fermé leurs portes pour n’accueillir que des urgences dans le chef-lieu.

« Eviter la guerre civile »

« Ce que nous voulons éviter, c’est la guerre civile », atteste sur un ton solennel Moutouin Soufiane, l’un des leaders des célèbres « collectifs de citoyens » connus pour leurs positions radicales contre l’immigration en provenance des Comores voisines et rassemblés, jeudi 15 septembre, place de la République à Mamoudzou, dans le sillage de l’action lancée par les maires. « Mais à force de retenir la population avec une corde, celle-ci va finir par craquer », prédit le militant, vêtu de son éternel treillis. Autour de lui, seules 200 personnes ont fait le déplacement. « Les gens ont encore peur de prendre la route, aujourd’hui est une journée test mais on va faire des rassemblements dans tous les villages, on ne va pas s’arrêter là », promet cette figure du Collectif des citoyens de Mayotte 2018 formé à l’aune du mouvement social qui avait paralysé l’île pendant un mois et demi il y a quatre ans.

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« Pour une fois, les élus semblent prendre leurs responsabilités face à la gravité de la situation, nous ne pouvons pas ne pas les accompagner et nous veillerons à ce que le mouvement aille jusqu’au bout », embraie Safina Soula Abdallah, présidente du même collectif et successeure à ce poste de la désormais députée Estelle Youssouffa. Pour tous les militants présents, parmi lesquels une majorité de femmes en salouva (le pagne local) aux motifs ylang-ylang, la fleur symbole de Mayotte, la source de leurs maux est claire : l’immigration clandestine. Les exilés seraient même instrumentalisés, selon eux, par le gouvernement comorien pour semer le chaos sur l’île française.

Sur la place, ces mêmes discours se répètent sous les litanies traditionnelles diffusées à plein tube par une sono grésillante. Quand, tout à coup, c’est la ruée et les huées. Un bateau de la gendarmerie maritime vient faire des ronds dans l’eau à quelques mètres des manifestants. A son bord, une quinzaine de migrants interceptés en mer, comme l’atteste le kwassa-kwassa, un type de canot de pêche des Comores, remorqué par les militaires. Etrange coïncidence alors que, jamais, les patrouilleurs n’accostent à Mamoudzou.

Politique du tout-sécuritaire

Quoi qu’il en soit, la lutte contre l’immigration clandestine ne serait pas assez intense pour les manifestants, alors que plus de 20 000 Comoriens sont reconduits dans leur pays chaque année. Les élus locaux réclament aussi au préfet d’agir avec plus de vigueur en la matière, en accélérant les destructions de bidonvilles ou en positionnant un navire de la marine nationale entre Anjouan et Mayotte, comme le demande le premier vice-président du département. Face à ces exigences, le délégué du gouvernement, Thierry Suquet, a annoncé que les forces de l’ordre pourront désormais utiliser les mêmes armes que le RAID contre les bandes de délinquants.

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C’est oublier que ces dernières sont essentiellement constituées de mineurs, souvent nés sur le territoire et qui ont donc vocation à rester à Mayotte. Surtout, c’est oublier que l’aide sociale à l’enfance, compétence du département est, sinon dysfonctionnelle, voire quasi inexistante, comme s’en sont indignés récemment la chambre régionale des comptes et la Défenseure des droits. Par ailleurs, le taux d’investissement par élève à Mayotte est le plus faible de France, et les agents de la protection judiciaire de la jeunesse, relevant de l’Etat, dénoncent régulièrement le manque de moyens structurels auxquels ils font face. La route semble encore bien longue pour sortir de l’impasse.

 


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