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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : médiapart - Victor Fièvre - 17/12/2022

Un père de famille géorgien, habitant de Coutances, a été expulsé le 26 novembre au terme d’un acharnement policier dans le sillage des récents appels à la fermeté de Gérald Darmanin adressés aux préfets. Sur le sol français depuis 2019, sa femme et ses enfants pourraient subir le même sort dans les prochains jours. Un cas pratique local qui donne le ton de l’application à venir de la future loi Asile et immigration portée par le ministre de l’intérieur. 

Une circulaire de Gérald Darmanin tombée au mauvais moment pour Tavtukh Namazov. Vivant depuis 2019 en France, avec sa femme et ses trois enfants, il a été expulsé vers la Géorgie le samedi 26 novembre. Un fait inédit pour les associations locales d’aide aux migrant·es de Coutances. « Depuis le début de notre activité, en 2005, on n’avait jamais connu d’expulsion parmi les personnes que l’on suit », note ainsi Jean-Claude Groud, délégué diocésain de la Pastorale des migrants.

La situation de Tavtuk Namazov entre inévitablement en résonance avec l’actualité nationale et le durcissement des règles à l’égard des exilé·es. Le 17 novembre, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur, a publié une circulaire demandant aux préfets plus de fermeté. Il souhaite l’application des OQTF (obligations de quitter le territoire français) pour toutes celles et ceux sous le coup de cette mesure, et non plus seulement pour les « délinquants ».

Le lendemain de cette annonce, le 18 novembre, monsieur Namazov était convoqué au commissariat de Coutances. Pour Philippe Montarry, membre du groupe coutançais d’aide aux migrant·es, il s’agit là d’un « zèle manifesté par le préfet, qui a voulu appliquer la circulaire avec l’un des seuls cas qu’il avait sous la main ».

Capture d'écran du site de la préfecture de Seine-Maritime

Ce jeudi 15 décembre, la conjointe de monsieur Namazov, Ramila Uzunalovi, a été elle aussi convoquée au commissariat de Coutances. Accompagnée d’une traductrice, son entretien a duré près de deux heures. La préfecture lui a proposé un retour volontaire en Géorgie, avec une aide financière de l’Ofii (Office français de l’immigration et de l’intégration). La mère de famille a refusé. Elle doit donner une nouvelle réponse jeudi 22 décembre, mais son choix est clair, elle veut rester avec ses trois enfants, scolarisés en France.

La veille de la convocation, le préfet avait assuré à Stéphane Travert, député de la majorité présidentielle dans la Manche, qu’aucune procédure d’expulsion n’était d’actualité. Ramila Uzunalovi a déjà reçu une OQTF en 2020, et une deuxième serait synonyme de retour en Géorgie. Un dossier d’autorisation de séjour est en cours en tant que mère accompagnante d’un enfant malade, puisque l’aîné des enfants souffre de surdité. Le collectif 50 pour les droits des étrangers, qui accompagne la famille géorgienne, espère obtenir une réponse rapidement, avant qu’il ne soit trop tard.

L'expulsion de Tavtuk Namazov reste incompréhensible pour beaucoup. Y compris pour le député Stéphane Travert, interpellé par les associations sur le sujet. « Il a une famille et il présentait toutes les conditions pour rester. » Pour autant, il ne fait pas le lien avec les consignes du ministère de l’intérieur. « La préfecture de la Manche n’est pas dans une politique du chiffre, ose-t-il. Il y a une particularité dans son dossier qui a fait qu’il ne pouvait pas rester, mais je ne sais pas encore laquelle. » La préfecture n’a pas donné suite à nos demandes de précision.

Emmené trois fois à Paris par la PAF

Le 21 septembre, Tavtukh Namazov, en voiture, se fait contrôler par la gendarmerie. Il n’est pas en infraction mais ne peut présenter de titre de séjour. Il reçoit alors une deuxième OQTF, après une première reçue en 2020. Il est ensuite assigné à résidence pour 90 jours et doit signer trois fois par semaine au commissariat. Le lendemain de la publication de la circulaire de Darmanin, il est convoqué au commissariat.

Son expulsion est compliquée à comprendre pour beaucoup, au regard de son dossier. La façon dont elle s’est déroulée l’est tout autant. En neuf jours, le père de famille a été déplacé par la police aux frontières (PAF) sur plus de 1 500 kilomètres. « Il a été emmené trois fois à Paris », souligne Ramila Uzunalovi, sa conjointe, restée à Coutances avec ses trois enfants.

Le 18 novembre, il est envoyé au centre de rétention administrative de Cherbourg. Du Cotentin, la PAF le transporte à l’aéroport d’Orly. Un souci administratif empêche vraisemblablement son embarquement.

Il rentre alors à Coutances, avant d’être à nouveau convoqué au commissariat, le 22 novembre. Malgré la présence d’une vingtaine de personnes en soutien, nouveau trajet, direction le centre de rétention de Vincennes. Il est présenté au juge des libertés et de la détention et celui-ci ordonne sa libération pour un vice de forme, la préfecture n’ayant pas demandé la prolongation de la rétention dans le délai légal de 48 heures.

Après cette décision, le ressortissant géorgien fait son retour à Cherbourg le vendredi 25 novembre, toujours accompagné de la PAF, et doit se présenter dès le lendemain, à 6 heures du matin, au commissariat. Cette fois, le trajet vers Paris est le dernier et Tavtukh Namazov est expulsé pour de bon vers la Géorgie.

« Je ne comprends pas pourquoi il y a eu autant d’allers-retours, relève Jean-Claude Groud, bénévole qui a suivi de près le dossier. En plus de la brutalité que ça représente pour monsieur Namazov, c’est un coût pour la collectivité. » L’empressement montré pour appliquer la circulaire Darmanin expliquerait-il ces incohérences organisationnelles ? Aucune réponse n’a été donnée de la part de la PAF et de la préfecture.

L’association et la famille géorgienne ont été prises de court par la circulaire de Gérald Darmanin. « Cette circulaire, c’est la mise en application de sa future loi Asile et immigration, soulève Philippe Montarry. Il veut rassurer la droite pour qu’elle la vote. »

La loi devrait être débattue début 2023. Le 27 octobre dernier, le ministre de l’intérieur avait annoncé vouloir « rendre impossible la vie des OQTF en France ». Sa menace semble avoir été mise à exécution. D’autres étrangers et étrangères, à l’instar de Tavtuk Namazov, pourraient bientôt connaître le même sort. À commencer par sa femme et ses trois enfants.

 


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