Inscription au Bulletin  bulletin icon    Notre page FacebookNotre page Twitter  Bonjour Visiteur

Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : le monde - Nassurdine Haidari, Louis-Georges Tin - 11/04/2023

Alors que de plus en plus d’élèves et de parents ont la sensation que les origines ethniques ont une influence sur l’orientation scolaire en France, le président et l’ancien président du Conseil représentatif des associations noires, Nassurdine Haidari et Louis-Georges Tin, préconisent, dans une tribune au « Monde », le lancement d’une vaste enquête sur ce sujet.

L’école républicaine est au fondement de nos valeurs. C’est là que s’élabore l’esprit citoyen, dès le plus jeune âge. L’école est la matrice de l’égalité. Et pourtant, l’orientation scolaire est parfois biaisée par des stéréotypes liés aux origines, réelles ou supposées. Ces préjugés affectent lourdement le cursus et le destin des élèves concernés. Ce qui est vrai du genre, des origines sociales est aussi vrai des origines ethniques.

C’est en tout cas ce qu’affirment, non sans amertume, de nombreux parents. Quand les enfants sont noirs ou arabes, ils se voient proposer des débouchés moins valorisants que ceux qui sont offerts aux élèves du groupe majoritaire. Quand ils ont les mêmes notes que les autres, en fin de 3e, ils ne sont pas orientés vers les mêmes filières.

De ce fait, le public multicolore des collèges ne se retrouve pas dans les lycées qui, lorsqu’ils sont techniques, ou a fortiori professionnels, tendent à devenir de véritables ghettos scolaires. En 2005, déjà, les sociologues Georges Felouzis, Françoise Liot et Joëlle Perroton avaient publié un livre très intéressant sur ce sujet : L’Apartheid scolaire. Enquête sur la ségrégation ethnique dans les collèges (Seuil).

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés « Tant qu’il ne sera pas possible de mesurer la mixité d’origine d’un collège, les pouvoirs publics resteront impuissants »

Le phénomène n’est pas seulement d’ordre socio-économique, il est également d’ordre ethno-racial. Bien sûr, le fils d’ouvrier et le fils d’avocat n’auront pas les mêmes chances. Mais de plus, en bien des lieux, à notes égales, le fils d’ouvrier blanc et le fils d’ouvrier noir ou arabe n’auront pas forcément les mêmes propositions à l’issue du conseil de classe. Pour les élèves ayant des notes tout à fait bonnes, ou franchement mauvaises, la question ne se pose guère : l’orientation sera plus ou moins automatique.

Impression de mise à l’écart

Mais pour tous ceux, et ils sont nombreux, qui ont entre 8 et 10 de moyenne générale, il y a une marge de subjectivité importante dans la décision, et les biais ethniques peuvent jouer un rôle considérable. Aux uns, la filière générale, permettant des débouchés très larges ; aux autres, les filières technologiques et professionnelles, dont les débouchés sont plus limités, et moins valorisants socialement. Ces orientations discriminantes constituent littéralement la fabrique du destin.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Mixité scolaire : « Mettre dans les mêmes classes des enfants issus de milieux différents est la meilleure manière de créer du commun »

Bien sûr, il ne s’agit pas de culpabiliser les professeurs. Pour la plupart, ils sont profondément attachés au respect de l’égalité républicaine. Mais c’est de manière inconsciente que, bien souvent, ils contribuent à ces discriminations systémiques. Par ailleurs, il est aussi possible que les parents appartenant à des minorités ethniques, et parfois d’origine étrangère, maîtrisent moins bien que les autres les règles et les ressources de l’institution scolaire, ce qui pourrait expliquer en partie les processus de marginalisation que l’on peut constater.

Quoi qu’il en soit, cette impression de mise à l’écart que ressentent de nombreux parents et de nombreux élèves est confirmée par toute une littérature scientifique récente et internationale. Cependant, jusqu’ici, dans notre pays, à part quelques travaux pionniers, cette problématique a été largement occultée.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés A l’école, un faisceau d’indices dessine des inégalités selon l’origine ethnique

Plusieurs raisons expliquent cette situation. Il est notamment difficile d’imaginer en France que l’école, cœur battant de la République, puisse être corrompue par la gangrène de la discrimination. C’est pourtant la réalité : il n’y a pas de miracle. Les discriminations qui existent à l’extérieur de l’école se retrouvent aussi à l’intérieur. Il faut le reconnaître : il est temps de sortir du tabou.

Quels sont les territoires concernés ?

C’est pourquoi nous interpellons ici le ministre de l’éducation nationale qui, par le passé, a justement combattu les discriminations raciales. Une grande enquête sur la « fabrique du destin, l’orientation scolaire et les discriminations ethniques » doit être lancée. Elle aura pour but d’examiner la manière dont l’institution scolaire façonne les carrières à travers des dispositifs qui se révèlent parfois, et peut-être souvent, discriminants. L’étude devra être menée sur plusieurs établissements, dans des régions diverses, choisis afin de constituer un échantillon représentatif de la population scolaire dans le pays.

Lire aussi l’entretien : Article réservé à nos abonnés Résultats scolaires : « Il y a toujours une pénalité de l’immigration »

L’objectif de cette enquête sera double : il faudra d’abord établir un diagnostic. Le sentiment éprouvé par certains élèves ou parents d’élèves est-il justifié ? Sinon, pourquoi ont-ils cette impression persistante ? Si oui, comment fonctionne cette discrimination ? A quel moment du cursus intervient-elle ? Quelles sont les filières concernées ? Quels sont les territoires concernés ? Comment interviennent les agents dans ce processus, qu’il s’agisse des élèves, des parents, des professeurs, ou des autres sujets intervenant dans le circuit scolaire ? Quel impact ces orientations discriminantes ont-elles sur les carrières ? Quel est le coût économique pour le pays ? Le phénomène est-il semblable à ce qui a été observé dans d’autres pays ?

Et il conviendra ensuite de proposer des recommandations : si le diagnostic est exact, comme nous le pensons, il sera bien sûr opportun de réfléchir aux solutions possibles. Elles pourront être proposées aux partenaires de l’institution scolaire : syndicats de professeurs, de parents d’élèves, ministères, instituts de formation des professeurs, afin qu’ils puissent faire évoluer leurs pratiques en conséquence.

Archives de 2015 : Article réservé à nos abonnés « Oui, la ségrégation ethnique gangrène notre pays »

Dans un contexte où les enquêtes internationales comme celle de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ne cessent de montrer la réalité dramatique des inégalités dans le système scolaire français – inégalités qui sont, selon nous, et sociales et raciales –, il importe que le ministère de l’éducation nationale prenne cette question à bras-le-corps, lance une grande enquête sur le sujet et mette en œuvre les mesures qui s’imposent afin que l’égalité et la justice soient mieux respectées dans le pays qui est le nôtre. Comme le disait Léon Gambetta (1838-1882), « la véritable égalité, ce n’est pas de constater des égaux, c’est d’en faire ».

 


Calendrier d'Événements

Lun Mar Mer Jeu Ven Sam Dim
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
29
30
Sauvegarder
Choix utilisateur pour les Cookies
Nous utilisons des cookies afin de vous proposer les meilleurs services possibles. Si vous déclinez l'utilisation de ces cookies, le site web pourrait ne pas fonctionner correctement.
Tout accepter
Tout décliner
En savoir plus
Essentiel
Ces cookies sont nécessaires au bon fonctionnement du site, vous ne pouvez pas les désactiver.
Session de l'utilisateur
Identifie la session ouverte par l'utilisateur
Accepter