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Source : le monde - Iris Derœux - 24/08/2022

Quelques moments de l’histoire récente du 101e département français éclairent sur la difficulté actuelle de juguler l’immigration clandestine.

Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a achevé, mardi 23 août, une visite de trois jours à Mayotte afin d’y montrer la détermination de l’Etat à lutter contre l’immigration clandestine. Peuplé de près de 350 000 à 400 000 habitants, l’archipel a vu sa population quadrupler entre 1985 et 2017, selon l’Insee, sous l’effet conjugué d’une forte natalité et des phénomènes migratoires. Mayotte compte désormais 50 % d’étrangers, majoritairement en provenance des Comores voisines.

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Pour comprendre les tensions migratoires qui caractérisent aujourd’hui Mayotte, il est utile d’élargir la focale. Mayotte appartient historiquement à un archipel composé de trois autres îles : Anjouan (située à moins de 70 kilomètres), Mohéli à 130 kilomètres et Grande Comore à 190 kilomètres. La fragmentation progressive de cet espace situé à l’est de l’Afrique explique en grande partie les difficultés actuelles.

  • Décembre 1974 : Mayotte se sépare du reste des Comores

D’abord colonie française, les îles formant l’archipel des Comores constituent un seul et même territoire d’outre-mer rattaché à la France de 1946 à 1975. Leurs liens sont anciens : des familles sont dispersées sur les quatre îles, les unions à travers l’archipel sont fréquentes, les échanges culturels et commerciaux, multiples.

L’année 1974 marque un moment de bascule : l’archipel souhaitant accéder à son indépendance, une consultation d’autodétermination y est organisée. Les habitants d’Anjouan, de Mohéli et de Grande Comore se prononcent pour l’indépendance ; seule Mayotte vote pour le maintien au sein de la République française. La France, qui souhaite maintenir sa présence stratégique dans l’océan Indien, décide de prendre en compte ces résultats séparément. Et ce, en dépit du droit international : quelques jours avant le scrutin, l’Organisation des Nations unies demandait à la France de respecter l’unité et l’intégrité territoriale de l’archipel. « Cet événement est un coup de force juridique », estime Claude-Valentin Marie, expert de l’outre-mer à l’Institut national d’études démographiques.

Tandis que Mayotte obtient un statut hybride et provisoire de « collectivité territoriale », en 1976, l’Etat comorien naissant, composé des trois autres îles, conteste cette souveraineté française et obtient à plusieurs reprises le soutien de l’assemblée générale des Nations unies et de l’Union africaine. A partir de là, les élites mahoraises s’inquiètent d’un éventuel retour dans l’ensemble comorien et revendiquent de plus en plus vivement un statut de département d’outre-mer pour Mayotte.

  • Janvier 1995 : fin de la libre circulation entre Mayotte et les Comores

Après le référendum sur l’indépendance, les relations et flux de populations entre les îles, à commencer par Mayotte et Anjouan, se complexifient. Mayotte gagne en attractivité, tandis que l’instabilité politique abîme le reste des Comores. Entre 1975 et 1997, la population de Mayotte passe, d’après l’Insee, de 45 000 à 131 000 personnes.

« Si l’on schématise, plus les cousins comoriens arrivent, plus les Mahorais demandent des protections institutionnelles aux autorités françaises », résume le démographe Claude-Valentin Marie. Dans ce contexte, en 1995, le gouvernement français met en place une procédure de visa, inexistante jusque-là, pour les Comoriens souhaitant se rendre sur l’île de Mayotte. L’obtention de ce « visa Balladur » étant ardue, les traversées, qui étaient jusqu’alors habituelles, commencent à se faire de manière clandestine.

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« Le durcissement des politiques migratoires engendre des conditions de traversée de plus en plus difficiles et provoque un nombre important de décès en mer qui restent très mal documentés, confirme la sociologue Nina Sahraoui, qui a mené une enquête de terrain sur les femmes enceintes à Mayotte. En outre, ces politiques produisent de l’immobilisation : des personnes qui feraient très probablement des allers-retours, notamment pour visiter des familles dispersées, se trouvent piégées du fait de leur irrégularité. »

  • Mars 2011 : Mayotte devient un département d’outre-mer

Après le vote des Mahorais en 2009, la revendication ancienne de la départementalisation est finalement satisfaite. Le 31 mars 2011, Mayotte devient le 101e département français, et le 5e français d’outre-mer. Mais ce nouveau statut fait entrer Mayotte dans une période de grandes tensions sociales : les attentes en matière de développement économique et d’amélioration des droits sociaux étant très fortes, la population est déçue. Quantité d’indicateurs continuent d’être au rouge dans ce nouveau département, du plus fort taux de chômage des jeunes au plus fort taux d’illettrisme en France.

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Les conséquences sont doubles. Sur l’île, les flux migratoires en provenance des îles proches se poursuivent, et le ressentiment des Mahorais à l’égard de leurs voisins comoriens s’accentue. En parallèle, les départs de Mayotte augmentent. Comme le soulignent les recherches d’Antoine Math, économiste à l’Institut de recherches économiques et sociales, l’île devient une terre d’émigration. Ce sont avant tout les jeunes qui quittent l’île, en premier lieu vers La Réunion et, dans une moindre mesure, vers la métropole.

  • Septembre 2018 : le droit du sol est modifié à Mayotte

Au fil des ans, la réponse politique prend la forme d’un durcissement de l’accès à la nationalité française sur le sol mahorais. Si les dispositions s’accumulent progressivement, 2018 représente un changement de cap majeur : le code de la nationalité française est revu dans le cadre de la « loi pour une immigration maîtrisée », et le droit du sol y est spécifiquement restreint pour les enfants nés à Mayotte de parents étrangers. Pour qu’ils bénéficient du droit du sol et qu’ils accèdent à la nationalité française dans les mêmes conditions que sur le reste du territoire français, les parents doivent désormais prouver un séjour régulier de trois mois avant la naissance de l’enfant.

« Il s’agit d’une rupture majeure dans le code de la nationalité. Il est d’autant plus important de la comprendre qu’elle a une suite politique », insiste Claude-Valentin Marie. Dans un long entretien au Journal du dimanche, le 21 août, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, s’est en effet prononcé en faveur d’un nouveau durcissement du droit du sol et propose de conditionner la nationalité française d’un enfant à un séjour régulier d’au moins un an à Mayotte, et non plus trois mois, pour au moins un des deux parents.

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