Inscription au Bulletin  bulletin icon    Notre page FacebookNotre page Twitter  Bonjour Visiteur

Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : médiapart - Nejma Brahim - 02/05/2023

Que s’est-il passé dans ce village situé au sud de Mamoudzou, où des groupes de jeunes ont affronté policiers et gendarmes durant trois jours, avant même que l’opération « Wuambushu » ne débute ? Selon nos informations, des habitants ont été gazés la veille de l’Aïd, déclenchant les hostilités qui ont suivi.

Tsoundzou (Mayotte).– Dans les médias, les affrontements à Tsoundzou ont été évoqués partout ou presque, au moment où l’opération « Wuambushu » était lancée par les autorités pour éradiquer les bidonvilles, où se réfugieraient les « délinquants » et personnes sans papiers français. La situation aurait « rapidement dégénéré », selon Mayotte La Première.

Écouter l’article
Le visionnage de ce contenu peut entraîner un dépôt de cookies de la part de la plate-forme le proposant. Compte-tenu de votre refus du dépôt de cookies nous avons bloqué la lecture. Si vous souhaitez continuer et lire le contenu vous devez nous donner votre accord en cliquant sur ce cadre.
© Mediapart

« Une quarantaine de jeunes, armés de machettes et de pierres, s’en prennent aux automobilistes en raison de l’imminence des opérations décasages et des expulsions », écrit de son côté Mayotte Hebdo. « Opération Wuambushu : de premiers affrontements entre forces de l’ordre et délinquants », reprend Europe 1.

Mais dans ce petit village situé à cinq kilomètres au sud de Mamoudzou, c’est un tout autre son de cloche qui résonne depuis plusieurs jours. « Ça a commencé jeudi soir, se souvient Amdou, un jeune habitant de Tsoundzou. J’étais avec des amis dans le parc et les policiers sont arrivés pour nous contrôler alors qu’on ne faisait rien de mal. »

 

Les restes d'un barrage formé par des jeunes lors des affrontements à Tsoundzou, le 28 avril 2023. © Nejma Brahim / Mediapart

Selon Fatawi, un autre jeune, les forces de l’ordre auraient ensuite « encerclé le village », créant un climat de psychose. Ce soir-là, selon Ana*, une bénévole associative : « Les habitants ont eu très peur, tout le monde m’a appelée en panique et était persuadé que les policiers venaient pour décaser les gens. »

Gael* et Zak*, deux autres bénévoles, se souviennent d’un climat « pesant » avant l’Aïd (célébré le samedi 22 avril à Mayotte). « On sentait les jeunes très inquiets, presque inertes. On voyait beaucoup d’images montrant l’arrivée des forces de l’ordre sur l’île, leurs camions, leur équipement… Les jeunes du coin étaient complètement happés par Wuambushu. »

Repérage et gazage

Et de souligner qu’à Tsoundzou, aucune maison n’avait été numérotée en signe de démolition prochaine. « Mais les gens ici savent que le village est stigmatisé, perçu comme un gros foyer de délinquance, avec des sans-papiers dans les bidonvilles. »

À leur arrivée à Tsoundzou 1, les jeunes les alpaguent. « Ils nous racontent que depuis 16 heures, une quarantaine de CRS les observent. On pensait qu’ils visaient le quartier “Brésil”, plus récent et plus escarpé, dans le cadre de Wuambushu… » Tous deux décident de rester et affirment avoir vu, à la nuit tombée, des « flics pas très équipés », dont certains « en polo », s’enfoncer dans le village une carte à la main ; certains prenant en photo les ruelles. « D’autres sont arrivés avec des lampes torches et semblaient faire du repérage. »

Les forces de l’ordre sont restées postées sur la place aux deux mosquées, elles étaient beaucoup plus équipées que la veille et armées.
Zak*, bénévole associatif

Le jour même, le maire de Mamoudzou était venu s’exprimer auprès des habitant·es pour les informer que la police viendrait mais « qu’il ne fallait pas s’inquiéter ». « J’ai eu l’impression qu’ils profitaient de l’heure du foutari [le repas de rupture du jeûne, en shimaoré – ndlr] pour entrer dans le village », estime Gael, qui se souvient ensuite d’un « énorme drone » survolant le village. Le lendemain soir, soit la veille de l’Aïd, les forces de l’ordre sont revenues, à la même heure.

« Les forces de l’ordre sont restées postées sur la place aux deux mosquées, elles étaient beaucoup plus équipées que la veille et armées. À 22 heures, j’ai vu de premières étincelles sur le marché, situé de l’autre côté de la route nationale au niveau du parc », se remémore Zak. Des enfants auraient, explique un adolescent, « joué avec des pétards » et les forces de l’ordre auraient répliqué par du gaz lacrymogène.

 

Une voiture appartenant à la police aurait été brûlée dans la nuit de dimanche à lundi à Tsoundzou. © Nejma Brahim / Mediapart

« C’était à deux mètres du marché, le dernier jour de ramadan, donc autant dire qu’il y avait du monde. Les gens pleuraient, ça a vite créé un mouvement de foule », poursuit le bénévole associatif, qui a pris plusieurs clichés de la place enfumée par le gaz lacrymogène. Selon l’adolescent, des enfants auraient perdu connaissance au milieu de la fumée qui envahissait le village. « Après, ils ont interpellé un jeune et c’est comme ça que les tensions ont commencé. »

Très vite, des groupes de jeunes ont formé un barrage pour bloquer la route, dont certains avaient, selon Zak, des machettes. Ce dernier a bien tenté de fuir par la route, en vain. Une dizaine de camions de CRS sont alors arrivés sur les lieux, tandis que des jeunes, réfugiés le long de la vallée de Kwalé, les caillassaient. « Je pense que des jeunes de Tsoundzou 1 et de Tsoundzou 2 se sont rassemblés, explique Gael. Dans ce genre de situation, c’est très contagieux. »

De violents affrontements

Décasages annoncés çà et là, repérages dans le village, gazage la veille de l’Aïd… Pour Gael, les forces de l’ordre ont « cherché à attiser les tensions pour pouvoir justifier l’opération Wuambushu ». « Ce devait être la CRS 8, car ils étaient suréquipés et semblaient ne pas connaître la zone », suppose Zak. Arrivée mercredi 19 avril sur l’île, celle-ci était en effet mobilisée à Tsoundzou depuis vendredi selon Mayotte La Première – soit le soir où les habitant·es ont été gazé·es.

La nuit la plus agitée reste celle de dimanche soir, comparable à une « zone de guerre » selon Zak. En remontant le long de la rivière Kwalé, vendredi 28 avril, la violence de ces heurts se matérialise sous nos yeux : les restes noircis d’une voiture de police de type Duster, une multitude de grenades lacrymogènes et les fenêtres brisées d’une habitation jouxtant le chemin de terre accidenté.

 

Des pelleteuses ont été incendiées sur le chantier du stade de Tsoundzou. © Nejma Brahim

« C’est à cause de la police que les jeunes se révoltent. La France a préparé une bombe atomique à Mayotte », commente Djamal, un jeune de Tsoundzou. Sur le trajet, Fatawi explique qu’ici, des familles avec bébé ou enfants sont allées se réfugier sur les hauteurs dès jeudi soir pour échapper aux forces de l’ordre. « Ils sont obligés de vivre cachés, comme des animaux. »

En redescendant vers la route nationale, le chantier du stade laisse entrevoir des pelleteuses incendiées dans la nuit de dimanche à lundi. « Les jeunes les brûlent parce que c’est avec ça qu’ils détruisent les maisons lors des décasages. » Pour d’autres, ces derniers s’en prennent gratuitement à des entrepreneurs et des ouvriers en les empêchant de travailler.

Lundi, des images de jeunes en groupe, vêtus de combinaisons blanches (comme celles que l’on a pu voir durant la pandémie de Covid-19), ont circulé sur les réseaux sociaux. En réaction, le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, s’exprimait lundi depuis Tsoundzou, avant d’être interpellé par une habitante dont la maison avait été incendiée lors des affrontements.

« Ma maison a été détruite. Je n’ai rien fait à personne, moi ! Vous allez faire des trucs et vous n’êtes pas capable de les assumer ? », lâche-t-elle tout en étant éloignée par un agent de police.


Calendrier d'Événements

Lun Mar Mer Jeu Ven Sam Dim
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
29
30
31
Sauvegarder
Choix utilisateur pour les Cookies
Nous utilisons des cookies afin de vous proposer les meilleurs services possibles. Si vous déclinez l'utilisation de ces cookies, le site web pourrait ne pas fonctionner correctement.
Tout accepter
Tout décliner
En savoir plus
Essentiel
Ces cookies sont nécessaires au bon fonctionnement du site, vous ne pouvez pas les désactiver.
Session de l'utilisateur
Identifie la session ouverte par l'utilisateur
Accepter